03.06.19

Dimanche de Pâques, 21 avril 2019
Nous sommes un peuple de Pâques : Alléluia est notre chant ! Louez le Seigneur, Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! Louez et remerciez le Seigneur, le tombeau était vide, le monde se réjouit. Jésus a vaincu le mal par le bien, le désespoir par l'espérance, le doute par la foi, la haine par l'amour, l'orgueil par l'humilité. La création est refaite à neuf. Le Seigneur ressuscité et le Fils fidèle et obéissant du Père éternel a tout recréé et continue de le faire.
Nous n'appartenons plus au monde du vieil Adam, enlevé de la terre, désobéissant et rebelle, mais au nouvel Adam, Jésus-Christ, le Fils fidèle, loyal, docile et obéissant qui est mort sur une croix. « Ô mort, où est ta victoire ? Ô mort, où est-il, ton aiguillon ? ... Merci à Dieu, qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ » (1 Cor 15, 55).
« Thomas, cesse d’être incrédule, sois croyant » (Jn 20, 27). Avec saint Thomas l'apôtre, ce matin, nous aussi nous professons notre foi dans le Ressuscité en disant ensemble : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Jésus pose la même question qu’il avait posée alors à Thomas dans la chambre haute, aujourd'hui à tous et à chacun d’ente nous dans la chambre haute de nos propres lieux, où nous nous réunissons en prière, Jésus demande : Es-tu heureuse aujourd'hui, ma sœur, es-tu heureux, mon frère, parce que tu crois sans voir Jésus face à face ?
Dans une de mes récentes retraites aux Sœurs M.C., j'ai demandé : « Combien d'entre vous ont connu sainte Teresa de Calcutta durant sa vie ?» Seulement deux sur vingt et une ont levé la main. Pourtant, toutes suivent son exemple et croient en son charisme. « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20, 29).
C’est la foi dans le Ressuscité qui nous a fait quitter notre lieu de naissance, nos êtres chers et nos proches, « nos barques et nos filets », nos parents et nos biens, pour renoncer à notre liberté et à notre sécurité, pour rompre avec nos liens naturels et nos attaches, pour sacrifier nos désirs naturels et notre soif de confort, de commodité, de fortune et de richesse, de gloire et d’honneur… Nous pouvons avoir ici une liste interminable de choses auxquelles nous avons renoncé. La dernière chose à laquelle renoncer, cependant, est notre propre volonté.
Tout est possible parce que dans le Seigneur ressuscité, nous redécouvrons le vrai sens de la vie. Nous avons laissé l’Esprit nous faire renaître en Lui. Notre faim et notre soif naturelles du corps et la soif du cœur et de l'âme de l'homme ont une signification plus sublime. Nous découvrons la dimension transcendantale de toutes les réalités. Dans la foi, nous sommes capables de voir la présence de Jésus dans l'autre, particulièrement chez les pauvres et dans l'Eucharistie.
Notre voyage de carême de quarante jours que nous avons fait avec Jésus en esprit et en vérité dans le désert de notre vie quotidienne est devenu une joie pour nous dans le Seigneur ressuscité. Lorsque notre nature humaine nous pousse très fortement dans le monde bruyant des lieux de conversations criards, distrayants et dérangeants, notre esprit nous invite de plus en plus à la solitude et au silence, à la contemplation et à la communion, parce que le Seigneur ressuscité, à travers sa fidélité persistante, par son amour authentique et sincère a donné une nouvelle dimension à la vie, à la souffrance et à la douleur ; En un mot, dans le Seigneur ressuscité, nous avons trouvé la vraie joie et le sens de la vie, et dans l’Eucharistie, nous recevons la force et la vitalité nécessaires. L'Eucharistie nous ouvre les yeux comme elle a ouvert les yeux des disciples d'Emmaüs lors de la fraction du pain. C'est lors de la fraction du pain que les disciples sont parvenus à reconnaitre Jésus qui avait marché et conversé avec eux tout au long du chemin.
Jésus n'a pas aboli la croix, la souffrance et les difficultés de notre vie quotidienne, il a donné un sens positif à la douleur et au chagrin. Tout ce qui était négatif et répugnant pour la nature humaine est devenu une source et un moyen pour un bonheur plus grand et durable. Ce que notre nature
humaine cherche à éviter est devenu un tremplin et non plus une pierre d'achoppement. Plus encore, les obstacles précédents sont devenus le pouvoir et la sagesse de Dieu. Saint Paul écrit : « Alors que les Juifs réclament des signes miraculeux, et que les Grecs recherchent une sagesse, nous, nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes. Mais pour ceux que Dieu appelle, …, ce Christ, est puissance de Dieu et sagesse de Dieu. » (1Cor 1, 22-24).
La croix et les souffrances ne sont plus une malédiction, mais un moyen de salut ; à tel point que nous disons : Nous T’adorons, Ô Christ, et nous Te bénissons, parce que Tu as racheté le monde par ta sainte Croix. « Quant à eux, quittant le Conseil suprême, ils repartaient tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus » (Actes 5, 41).
Je me souviens d'une fois où je donnais une retraite à un groupe d'hommes. Le troisième jour, je leur ai demandé d’apporter une petite croix de bois pour que chacun la tienne en main en faisant le chemin de croix. Tous sauf un, ont apporté une croix en bois comme je l'avais demandé. L'un d'entre eux a amené sa femme et a dit : « Père, voici ma croix, non pas une en bois, mais une réelle… ». Je lui ai alors dit qu'elle ferait le chemin de croix avec le groupe, mais qu'elle se tiendrait face à lui et qu’il devrait dire à chaque station : je t'adore, ô Christ, et je te bénis, parce que tu as racheté le monde et moi-même par cette sainte croix.
Nous savons tous que nous avons beaucoup de croix à endurer chaque jour, mais nous oublions que nous aussi nous sommes des croix les uns pour les autres par lesquelles nous sommes rachetés. Pas de croix, pas de rédemption. Nous ne pouvons pas expérimenter la vraie joie si notre joie ne naît pas de la douleur et de la mort. Nous connaissons tous le mot « mortification ». Ce mot vient de deux mots en latin “mortem facere”, se faire soi-même mourir ou mieux mourir à soi-même. Dans chaque mortification de quelque nature que ce soit, il y a la mort et la résurrection. La pratique de la mortification, ne nous rend pas seulement forts spirituellement mais aussi profondément joyeux, car c'est une participation aux souffrances et à la mort de Jésus pour sauver les âmes. Il n'y a pas de vie spirituelle authentique sans la pratique de l'ascèse.
Vita Consecrata, un des documents relativement récents de l'Église (25 mars 1996), parle de redécouvrir les pratiques ascétiques…. « Il faut aussi redécouvrir les moyens de l’ascèse, caractéristiques de la tradition spirituelle de l'Église et de chaque Institut. Ils ont constitué, et ils constituent toujours, un soutien pour un cheminement authentique vers la sainteté. L'ascèse, aidant à dominer et à corriger les tendances de la nature humaine blessée par le péché, est vraiment indispensable pour que la personne consacrée reste fidèle à sa vocation et suive Jésus sur le chemin de la Croix » (n ° 38).
La vie consacrée est enracinée dans le mystère pascal de la souffrance, de la passion, de la mort et de la résurrection de Jésus. Elles forment une seule réalité, un seul plaidoyer, une seule supplication, comme Jésus dans le jardin de Gethsémani : « Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ; cependant, que soit faite non pas ma volonté, mais la tienne. » (cf. Lc 22, 42). ) et la prière du pardon adressée depuis la Croix à ses ennemis : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu'ils font » (Lc 23, 34).
Tous ces éléments sont basés sur la réalité culminante de la résurrection de Jésus, qui est devenue la pierre angulaire de toute notre vie et de nos activités. Le Seigneur ressuscité nous donne une paix constante et une joie durable, un amour invincible et une espérance sans faille, un courage indomptable, mais avant tout, nous gagnons la vie éternelle.
Je voudrais terminer mes réflexions par les paroles de saint Grégoire de Nazianze :
« Si tu es un Simon de Cyrène ; Prends ta croix et suis le Christ. Si tu es crucifié à côté de lui comme un des voleurs, reconnais maintenant ton Dieu, comme le bon larron. Pour toi et à cause de ton péché, le Christ lui-même a été considéré comme un pécheur ; pour lui, par conséquent, tu dois cesser de pécher. Adore celui qui a été suspendu sur la croix à cause de toi, même si tu y es suspendu toi-même. Tire profit de la honte ; achète le salut avec ta mort. Entre au paradis avec Jésus et découvre à quel point tu es tombé. Là, contemple la gloire et laisse l’autre voleur moqueur mourir dans son blasphème.
Si tu es un Joseph d'Arimathie, va chez celui qui a ordonné sa crucifixion et demande le corps du Christ. Fais ta propre expiation pour les péchés du monde entier. Si tu es un Nicodème, comme l'homme qui adorait Dieu de nuit, apporte des épices et prépare le corps de Christ pour l'inhumation. Si tu es une des Marie, ou une Salomé, ou une Jeanne, verse des larmes tôt le matin. Sois la première à voir la pierre roulée, et même les anges, et peut-être Jésus lui-même ».
Si tu es Marie de Magdala, reste à l'extérieur du tombeau vide, regarde encore et encore à l’intérieur du tombeau vide. Ta persévérance te permettra de voir le Seigneur ressuscité, comme l'a fait Marie-Madeleine. Que ton espérance ne cesse jamais.
Je souhaite à chacun de vous une sainte Pâques, remplie d'espérance, de joie et de paix. Puissiez-vous continuer à être comme le cierge Pascal, brûlant d'amour pour Dieu et pour les autres.
Dieu vous bénisse.
Fr. Sebastian Vazhakala M.C.