14.01.17
23 décembre 2016
Quelques réflexions sur le Magnificat
« Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom ! » (Lc 1, 49)
Ceux qui prient la liturgie des heures, surtout les vêpres, prient chaque soir le cantique de Marie, dit le Magnificat. Cette incroyable prière de la Mère de Dieu est l'un des hymnes chrétiens qui reconnaît et exprime très profondément notre lien inséparable de l'amour de Dieu pour nous et de notre amour pour Dieu.
Le contexte est la rencontre de la mère de Dieu avec sa cousine Elisabeth, qui dans sa vieillesse était dans son sixième mois de grossesse. Marie, la Vierge de Nazareth, avec Jésus dans son ventre, va en hâte rencontrer sa cousine Elisabeth. Cette rencontre fut sacramentelle, rédemptrice et joyeuse. La rencontre fut purement basée sur l'amour. L'enfant à naître dans le ventre d'Elisabeth reconnut la présence de l'enfant à naître de Marie. Pendant que Marie et Elisabeth se rencontraient, il y avait aussi la rencontre des deux bébés à naître, le Rédempteur et le racheté.
Il y eut un sentiment de joie, et l'enfant à naître dans le ventre d'Élisabeth bondit de joie. Ste Teresa de Calcutta parlait souvent de la rencontre de la Mère de Dieu avec son précurseur, St Jean-Baptiste. Le Magnificat est la prière de gratitude de Marie, sa foi, son espérance, son amour et son humilité, qu'elle a exprimés en paroles. Elle commence par : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur … » Ici je ne cite pas tout le texte du Magnificat, mais seulement ces versets, sur lesquels je voudrais faire quelques commentaires.
En toute humilité, la Vierge de Nazareth a pris conscience de la main du Tout-Puissant en la choisissant pour être la Mère Vierge du Messie. Marie chante : « Désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom ! » (Lc 1, 48). Heureux est le jour où, comme Marie, nous sommes capables de reconnaître et de voir dans le cantique spirituel de Marie le reflet de notre vocation et de notre mission.
L'humilité est un don et une vertu. Même si c'est un don, il doit être cultivé jour après jour.
Que signifie être humble ? Qui est vraiment une personne humble ? Jésus a parlé de lui-même comme de l'humble. Il alla jusqu'à nous apprendre l'humilité de son cœur : « Apprends de moi, car je suis doux et humble de cœur ...» (Mt 11, 29). Notre-Dame se réfère à elle-même comme « la servante du Seigneur » : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole » (Lc 1, 38). Elle répète encore dans le grand cantique du Magnificat : « Il s’est penché sur son humble servante… » (Lc 1, 48).
On peut en dire autant de St Joseph. S'il n'était pas un homme humble et charitable, il n'aurait pas écouté l'ange, et il n'aurait pas accepté Marie comme sa femme quand il découvrit qu'elle attendait un enfant.
La vertu d'humilité se trouve dans toute personne sainte. C'est une condition préalable à la sainteté. L'humilité signifie alors : tout ce qui est bon en une personne vient de Dieu, qui est la source de toute bonté, de la miséricorde et de l'amour. L'humble ne nie pas la vérité mais il attribue tout ce qui est bon en lui ou en elle à Dieu et devient de plus en plus reconnaissant à Dieu, qui est le seul auteur de tout bien.
Quand nous arrivons à comprendre le don, le mystère et le miracle de notre vocation, nous sommes tous capables de voir le reflet de notre chemin de vie, de notre vocation et de notre mission dans le cantique de la vierge de Nazareth. Non seulement cela ... nous allons voir la vérité du Magnificat, au-delà des mots. Nous allons voir plus clairement la triple révolution dont la Vierge de Nazareth parle dans son cantique. Il est dit, il est chanté pour nous.
La première attaque, pour ainsi dire, concerne le "cœur fier". « Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. » (Lc 1, 51). La deuxième catégorie est très liée à la première, à savoir « le puissant ». Que fait Dieu avec les soi-disants puissants ? Il les fait descendre de leurs trônes et il élève les humbles (Lc 1, 52). Le troisième groupe concerne les soi-disants riches, qui ne reconnaissent pas que leurs richesses sont des bénédictions venant de Dieu et qu'ils ont l'obligation de les partager avec les pauvres. Dans le Magnificat, Notre Dame présente un contraste frappant, à savoir, qu'il a renvoyé les riches les mains vides et qu'il comble de biens les affamés.
Les trois groupes sont liés. C'est là la plus grande attaque du diable. St Ignace de Loyola explique comment nous libérer du triple attachement au pouvoir, aux richesses et à l'orgueil ou à la vanité. À la fin de son jeûne de quarante jours, le diable a tenté Jésus contre toutes les vertus basiques. Le danger est quand nous devenons aveugles et ne voulons pas changer nos vies afin de contrecarrer les tentations véhémentes et constantes du diable et mettre un terme aux désirs de la chair (sarx).
St Paul explique magistralement les conflits et la confrontation de l'Esprit (Pneuma), et de la chair (sarx). « Ce que le sarx (la chair, la nature humaine) veut, s'oppose à ce que l'Esprit (Pneuma) veut, et ce que l'Esprit veut s'oppose à ce que le sarx veut. Ils sont deux ennemis et cela signifie que vous ne pouvez pas faire ce que vous voulez… »
« Car les tendances de la chair s’opposent à l’Esprit, et les tendances de l’Esprit s’opposent à la chair. En effet, il y a là un affrontement qui vous empêche de faire tout ce que vous voudriez. » (Gal 5: 16-18).
Pratiquement parlant, ce que le sarx fait est juste l'opposé du comportement que les humains devraient avoir. Quand nous permettons au sarx de travailler en nous, nous devenons vraiment méchants. « On sait bien à quelles actions mène la chair : inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre. Je vous préviens, comme je l’ai déjà fait : ceux qui commettent de telles actions ne recevront pas en héritage le royaume de Dieu. » (Ga 5, 19-21).
Dans notre vie spirituelle, nous avons trois ennemis principaux, à savoir : le monde, le diable et le sarx (la chair). Nous pouvons facilement être victimes de ces trois ennemis. Afin de les contrer, nous avons les trois vœux traditionnels, privés ou publics, simples ou solennels, peu importe. Le vœu et la vertu de chasteté, le vœu et la vertu de pauvreté et le vœu et la vertu d'obéissance sont destinés à nous aider à surmonter les trois ennemis, qui continuent à nous attaquer jusqu'à notre dernier souffle. Soyons très conscients de cela et travaillons sur les vertus et les fruits de l'Esprit qui sont à l'œuvre en nous aussi. C'est ici que nous avons besoin d'une vie de prière très forte, d’une vie sacramentelle, des exercices spirituels, comme l'examen quotidien de conscience, la méditation, l'adoration, la prière contemplative, la lecture spirituelle, les confessions fréquentes et...
Ici encore, nous voyons l'œuvre du Pneuma (Esprit). St Paul explique dans la même lettre aux Galates. Il dit: « Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi. En ces domaines, la Loi n’intervient pas. Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair, avec ses passions et ses convoitises. Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit. Ne cherchons pas la vaine gloire ; entre nous, pas de provocation, pas d’envie les uns à l’égard des autres. » (Gal 5, 22-26).
« C’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés. Alors tenez bon, ne vous mettez pas de nouveau sous le joug de l’esclavage. » (Gal 5: 1).
Partagez vos biens avec les pauvres. Ici, il peut être approprié de citer St. Jean Chrysostome. Il exhorte avec véhémence les disciples du Christ à voir les besoins des pauvres. Dans ses propres mots: « Voulez-vous donc honorer le corps de Jésus-Christ? Ne le méprisez pas, lorsqu’il est nu et pendant qu’en cette Eglise vous le couvrez d’étoffes de soie, ne lui laissez pas souffrir ailleurs le froid et la nudité. Car Celui qui a dit « Ceci est mon corps, » et qui a produit cet effet par la vertu de sa parole, a dit aussi : « Vous m’avez vu souffrir la faim, et vous ne « m’avez pas donné à manger. Car quand vous « l’avez refusé à quelqu’un de ces petits, c’est « à moi-même que vous l’avez refusé. » (Matth. XXV.) Le corps de Jésus-Christ qui est sur l’autel, n’a pas besoin d’habits précieux qui le couvrent, mais d’âmes pures qui le reçoivent, au lieu que cet autre corps de Jésus-Christ formé des pauvres qui sont ses membres, a besoin de notre assistance et de tous nos soins. » (Evangelium St. Matthieu, Hom 50, 3-4 de Jean Chrysostome).
Le grand hymne de la Vierge de la visitation se conclut par la promesse consolante de la miséricorde, qui, bien que les portes saintes de la miséricorde aient été fermées partout, continue de fonctionner encore plus vigoureusement et avec plus d'enthousiasme, et nous devrions continuer à être miséricordieux comme notre Père céleste est miséricordieux (Lc 6, 36).
L'hymne sublime de Marie quand elle est allée rendre visite à sa cousine Elisabeth pour faire les œuvres de miséricorde se termine ainsi : « Il se souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais ... » (Lc 1, 55). La miséricorde de Dieu n'est pas quelque chose de transitoire, mais éternelle et infinie.
Le cantique de Marie est une prière pérenne de l'Église. En lui est résumé la saga spirituelle chrétienne à propos de la Très Sainte Trinité. Ne pensons pas que cette prière de notre Mère bénie est réservée seulement à la prière officielle de l'Eglise, aux vêpres, mais c'est une merveilleuse prière en tout temps. Elle n'est pas liée par le temps et l'espace. Ce n'est pas une prière qui doit être simplement lue dans l'Évangile de l’enfance de Luc, mais une prière qu'il faut prier avec délibération, méditation, contemplation et enthousiasme!
Que la Mère du Rédempteur, exemplaire d'humilité et de charité, intercède pour nous comme elle l'a fait à la fête de noces à Cana en Galilée. Elle veut que nous fassions «Tout ce qu’il vous dira,faites-le » (Jn 2, 5).
Joyeux et saint Noël et une nouvelle année pleine de paix pour tous.
Dieu vous bénisse
Père Sebastian Vazhakala m.c.