21.02.08

V
Le troisième jour est ressuscité des morts
1.« Le troisième jour ressuscité selon les Ecritures »
, dit Paul (1 Co 15,4), qui veut aussi voir, dans cette résurrection que personne n'attendait, un accomplissement de ce qui avait été annoncé, tandis que les évangélistes mettent cette annonce dans la bouche du Seigneur lui-même (Mc 10,34). Qu'on puisse assigner à un jour prédéterminé le tournant qui commande tout, montre que, prévu avec précision, ce tournant est datable pour les témoins eux-mêmes, comme tout ce qui est arrivé dans les jours mortels de Jésus. Cette datation est tout aussi importante que celle de la Passion sous Ponce Pilate. Le point chronologique où , dégagée de la mort de la nouvelle vie de Jésus s'éloigne de notre histoire mortelle, n'est pas un moment indéterminé; il est, dans cette histoire qui continue, un maintenant fermement situable.
Il n'en va pas comme si quelqu'un avait pu suivre et accompagner ce surgissement vers la vie à partir de la mort. Il s'agit d'un événement dans l'histoire de Dieu seul; il n'en va pas autrement de l'événement de l'Incarnation. Pourtant, tous les deux – entrée et sortie – touchent notre histoire humaine. Les femmes, les disciples rencontreront le Ressuscité au jour même de sa Résurrection, tandis qu'Élisabeth ne reconnut l'évenement de l'Incarnation que quelques jours après qu'il se fût produit (Lc 1,42 s).
2.
La plupart du temps, la Résurrection du Seigneur mort est attribuée par l'Écriture à Dieu le Père et à sa toute puissance. C'est approprié, puisque c'est avant tout dans l'obéissance au Père divin que le Fils a en vérité conduit à son accomplissement la décision (tri(u)nitaire) en faveur du salut. Dans les discours d'adieu johanniques, Jésus, qui va par la Croix glorifier l'amour du Père pour le monde, lui demande sa propre glorification, celle-ci lui ayant été déjà promise (Jn 13,32; 12,28).La toute puissance du Père, qui se manifeste dans le passage de la mort à la vie éternelle, est célébrée par Paul comme victorieuse (Ep 1,19s).
Mais puisque l'Esprit Saint du Père et du fils a médiatisé toute l'œuvre du salut entre le ciel et la terre, la Résurrection des morts peut lui être attribuée à lui aussi (en même temps qu'au Père cf. Rm, 8,11). Et si nous est étrangère la pensée qu'un mort s'éveille lui-même à la vie, on peut dire que Jésus lui-même, dont la mort – comme nous le disions – était œuvre de son plus vif amour, d'un amour qui était un avec l'Esprit d'amour divin, a lui aussi activement participé à ce passage vers la vie.
Dorénavant il vit « pour Dieu » (Rm 6,10); mais n'a-t-il pas toujours-déja vécu pour Dieu? Et s'il est « une fois pour toutes mort au péché » (id), ne l'a-t-il pas déjà fait dans sa vie et sa Passion? L'unique Dieu tri(u)nitaire opère l'œuvre qui est et reste la donnée centrale pour toute l'histoire de l'humanité : ceux qui sont par nature finis, condamnés à la corruption par le fait qu'ils se sont détournés de Dieu, reçoivent, par le rappel de l'Unique dans la vie éternelle, le don de l'espérance – et même de l'assurance – de l'y suivre (1 Co 15,21).
3. « Des morts ».
D'après ce qui précède, cela ne voudrait pas dire : en quittant les morts; mais : en allant les chercher, en les prenant avec lui, comme cela est merveilleusement décrit dans les prédications des Pères (cf. l'homélie du Vendredi-Saint au Bréviaire). Mais si Paul s'exclame ensuite victorieusement : « Où est_il, ô mort, ton aiguillon? La mort a été engloutie dans la victoire » (1 Co 15,34 s), cela veut dire encore quelque chose de plus : la réalité du mourir comme abandon de soi de l'homme a perdu son aiguillon (à savoir : qu'au bout du compte « tout était vain »), et se trouve incluse à l'intérieur du déploiement de la vie éternelle.
Si le Père se donne sans réserve au Fils, et si, à leur tour, Père et Fils se donnent à l'Esprit Saint, n'y-a-t-il pas là, au cœur de la vie éternelle, l'image originaire du plus beau mourir? Ce définitif ne-pas-vouloir-pour-soi n'est-il pas précisément le présupposé de la vie la plus heureuse? Notre misérable mourir est assumé dans ce « mourir vers » le plus vivant qui soit, de sorte que tout ce qui est de l'homme, sa naissance, sa vie et sa mort, se trouve désormais enveloppé, abrité, dans une vie qui ne connaît plus aucune limite.