05.04.19
Sainte-Marthe : prier «en présence de Jésus, avec Jésus», recommande le pape
Jésus est notre courage, Jésus est notre sécurité »
4 avril 2019
« Que le Seigneur nous donne la grâce … d’apprendre à intercéder, demande le pape François. Et quand quelqu’un nous demande de prier … faites-le sérieusement, en présence de Jésus, avec Jésus, qui intercède pour nous tous devant le Père. »
Le pape François met en garde contre la prière « tiède », surtout quand on prie « pour quelqu’un » : c’est ce qu’il a dit dans l’homélie prononcée à la messe dans la chapelle de la Maison Sainte-Marthe au Vatican ce jeudi matin 4 avril 2019, indique Vatican News en italien.
« La vraie prière la voilà: avec le Seigneur », affirme le pape. « Lorsque nous faisons une prière d’intercession courageuse …, nous le faisons avec Jésus : Jésus est notre courage, Jésus est notre sécurité, qui intercède pour nous à ce moment-là. »
« Quand je prie », poursuit le pape, c’est le Christ « qui prend ma prière et la présente au Père. Et Jésus n’a pas besoin de parler devant le Père : il lui montre les plaies. Le Père voit les plaies et fait grâce. Quand nous prions, pensons que nous le faisons avec Jésus. »
Il existe de nombreux exemples de prière d’intercession dans la Bible, explique le pape François, et « il faut du courage pour prier ainsi ». Le pape cite l’exemple de Moïse (première lecture) qui intercède auprès de Dieu pour son peuple qui s’est détourné de Dieu en adorant un veau d’or. Moïse supplie Dieu de ne pas « enflammer » sa « colère » « contre eux », et il lui parle « comme un maître à son disciple », c’est-à-dire comme s’il lui disait: « Mais, Seigneur, tu vas faire mauvaise impression… »
Le pape évoque aussi les histoires d’Abraham, d’Anne et de la Cananéenne. Abraham intercède pour sauver son neveu qui vit à Sodome. Anne, la mère de Samuel, qui, «en silence, balbutiant à voix basse, prie, prie et prie encore, en bougeant les lèvres, au point que le prêtre qui était là pense qu’elle est ivre». Elle priait pour avoir un enfant. C’est « l’angoisse d’une femme » qui intercède devant Dieu.
Dans l’histoire évangélique de la Cananéenne qui demande la guérison de sa fille, tourmentée par un démon, le Christ – au début – lui dit qu’il est envoyé seulement au peuple d’Israël, et qu’il n’est pas bon de jeter le pain des enfants aux petits chiens. La Cananéenne insiste en affirmant que même les petits chiens mangent des miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. Cette femme « n’a pas peur », souligne le pape, et obtient ce qu’elle veut.
Rappelez-vous, note le pape François, ces gens « luttent avec le Seigneur » pour qu’Il puisse «donner la grâce».
« Il faut tant de courage pour prier comme ça, dit le pape. Et nous sommes tièdes tant de fois. Quelqu’un nous dit : « Mais priez parce que j’ai ce problème… » Oui, oui, je dis deux ‘Notre Père’, deux ‘Je vous salue Marie’, et j’oublie. »
C’est « la prière du perroquet », affirme le pape : « La vraie prière, la voilà : avec le Seigneur. Et quand je dois intercéder, je dois le faire comme cela, avec courage. »
Dans le langage courant, explique le pape, les gens, « quand ils veulent arriver à quelque chose », « utilisent une expression » : « Ce la metto tutta » (« Je fais le maximum »).
« Dans la prière d’intercession, poursuit-il, c’est également vrai : « Je fais le maximum. » Et si les doutes nous viennent pendant la prière – « mais comment puis-je savoir que le Seigneur m’écoute ? » – il faut se rappeler que « nous avons une sécurité : Jésus, il est le grand intercesseur ».
En conclusion, le pape invite à prier avec courage : « et quand quelqu’un nous demande de prier, ne le faites pas avec deux petites prières – rien – non, faites-le sérieusement, en présence de Jésus, avec Jésus, qui intercède pour nous tous devant le Père ».
02.01.19
25.12.18
28.10.18

Synode 2018 : Dieu est jeune et il aime les jeunes
Homélie de la messe de clôture du Synode des Évêques
(Texte intégral)
28 OCTOBRE 2018
Homélie du pape François
L’épisode que nous avons écouté est le dernier que l’évangéliste Marc raconte au sujet du ministère itinérant de Jésus, qui peu après entrera à Jérusalem pour mourir et ressusciter. Bartimée est ainsi le dernier à suivre Jésus le long du chemin : de mendiant au bord de la route à Jéricho, il devient un disciple qui marche avec les autres vers Jérusalem. Nous aussi, nous avons cheminé ensemble, nous avons « fait synode » et maintenant cet Évangile scelle trois étapes fondamentales pour le chemin de la foi.
Tout d’abord, regardons Bartimée: son nom signifie « fils de Timée ». Et le texte le précise : « le fils de Timée, Bartimée » (Mc 10, 46). Mais, alors que l’Évangile le réaffirme, émerge un paradoxe : le père est absent. Bartimée se trouve seul le long de la route, hors de sa maison et sans père : il n’est pas aimé, mais abandonné. Il est aveugle et il n’a personne pour l’écouter. Jésus entend son cri. Et quand il le rencontre, il le laisse parler. Il n’était pas difficile de deviner ce que Bartimée demanderait : il est évident qu’un aveugle veut avoir ou retrouver la vue. Mais Jésus n’est pas expéditif, il prend le temps de l’écoute. Voilà la première étape pour faciliter le cheminement de foi : écouter. C’est l’apostolat de l’oreille : écouter, avant de parler.
A l’inverse, beaucoup de ceux qui étaient avec Jésus réprimandaient Bartimée pour le faire taire (Cf. v. 48). Pour ces disciples, l’indigent était un dérangement sur le chemin, un imprévu dans le programme. Ils préféraient leur temps à celui du Maître, leurs paroles à l’écoute des autres : ils suivaient Jésus, mais ils avaient en tête leurs projets. C’est un risque dont il faut toujours se garder.
Pour Jésus, au contraire, le cri de celui qui appelle à l’aide n’est pas un dérangement qui entrave le chemin, mais une question vitale. Comme il est important pour nous d’écouter la vie ! Les enfants du Père céleste écoutent leurs frères : non pas les bavardages inutiles mais les besoins du prochain.
Écouter avec amour, avec patience, comme Dieu le fait avec nous, avec nos prières souvent répétitives. Dieu ne se fatigue jamais, il se réjouit toujours quand nous le cherchons. Demandons, nous aussi, la grâce d’un cœur docile à l’écoute. Je voudrais dire aux jeunes, au nom de nous tous, les adultes : excusez-nous si, souvent, nous ne vous avons pas écoutés ; si, au lieu de vous ouvrir notre cœur, nous vous avons rempli les oreilles. Comme Église de Jésus, nous désirons nous mettre à votre écoute avec amour, sûrs de deux choses : que votre vie est précieuse pour Dieu, parce que Dieu est jeune et qu’il aime les jeunes ; et que votre vie est aussi précieuse pour nous, mieux encore nécessaire pour aller de l’avant.
Après l’écoute, une deuxième étape pour accompagner le chemin de la foi : se faire proches.
Regardons Jésus, qui ne délègue pas quelqu’un parmi la « foule nombreuse » qui le suivait, mais qui rencontre Bartimée personnellement. Il lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (v. 51). Que veux-tu ? Jésus s’identifie à Bartimée, il ne fait pas abstraction de ses attentes ; que je fasse : faire, pas seulement parler ; pour toi : non pas selon des idées préétablies pour n’importe qui, mais pour toi, dans ta situation. Voilà comment fait Dieu, en s’impliquant en personne, avec un amour de prédilection pour chacun. Dans sa manière de faire passe déjà son message : la foi germe ainsi dans la vie.
La foi passe par la vie. Quand la foi se concentre uniquement sur les formulations doctrinales, elle risque de parler seulement à la tête, sans toucher le cœur. Et quand elle se concentre seulement sur le faire, elle risque de devenir un moralisme et de se réduire au social. La foi au contraire, c’est la vie : c’est vivre l’amour de Dieu qui a changé notre existence. Nous ne pouvons pas être des doctrinaires ou des activistes ; nous sommes appelés à poursuivre l’œuvre de Dieu à la manière de Dieu, dans la proximité : liés à Lui, en communion entre nous, proches de nos frères. Proximité : voilà le secret pour transmettre le noyau de la foi, et non pas quelque aspect secondaire.
Se faire proches et porter la nouveauté de Dieu dans la vie du frère, c’est l’antidote à la tentation des recettes toutes prêtes. Demandons-nous si nous sommes des chrétiens capables de devenir proches, de sortir de nos cercles pour étreindre ceux qui « ne sont pas des nôtres » et que Dieu cherche ardemment. Il y a toujours cette tentation qui revient tant de fois dans l’Écriture : se laver les mains. C’est ce que fait la foule dans l’Évangile d’aujourd’hui, ce qu’a fait Caïn avec Abel, ce que fera Pilate avec Jésus : se laver les mains. Nous, à l’inverse, nous voulons imiter Jésus, et comme lui nous salir les mains. Lui, le chemin (cf. Jn 14, 6), pour Bartimée il s’est arrêté sur la route ; Lui, la lumière du monde (cf. Jn 9, 5), il s’est penché vers un aveugle. Reconnaissons que le Seigneur s’est sali les mains pour chacun de nous, et en regardant la croix ; et repartons de là, nous rappelant que Dieu s’est fait mon prochain dans le péché et dans la mort. Il s’est fait mon prochain : tout commence à partir de là. Et quand par amour pour lui, nous aussi, nous nous faisons proches, nous devenons porteurs d’une vie nouvelle : non pas des maîtres de tous, ni des experts du sacré, mais des témoins de l’amour qui sauve.
Témoigner est la troisième étape. Regardons les disciples qui appellent Bartimée : ils ne vont pas à lui, qui mendiait, avec une petite pièce pour l’apaiser ou pour dispenser des conseils. Ils vont à lui au nom de Jésus. En effet, ils lui adressent trois paroles seulement, toutes de Jésus : « Courage ! Lève-toi. Il t’appelle » (v. 49). Seul Jésus dans le reste de l’Évangile dit courage!, parce que lui seul ressuscite le cœur. Seul Jésus dans l’Évangile dit lève-toi, pour guérir l’esprit et le corps. Seul Jésus appelle, en changeant la vie de celui qui le suit, en remettant sur pied celui qui est à terre, en portant la lumière de Dieu dans les ténèbres de la vie. Tant d’enfants, tant de jeunes, comme Bartimée, cherchent une lumière dans la vie. Ils cherchent un amour vrai. Et comme Bartimée, malgré la nombreuse foule, appelle seulement Jésus, de même eux aussi cherchent la vie, mais souvent ils ne trouvent que de fausses promesses et peu de personnes qui s’intéressent vraiment à eux.
Il n’est pas chrétien d’attendre que les frères en recherche frappent à notre porte ; nous devrions aller vers eux, non pas en nous portant nous-mêmes, mais en portant Jésus. Il nous envoie, comme ces disciples, pour encourager et relever en son nom. Il nous envoie dire à chacun : « Dieu te demande de te laisser aimer par Lui ». Que de fois, au lieu de ce message libérateur de salut, nous n’avons porté que nous-mêmes, nos « recettes », nos « étiquettes » dans l’Église ! Que de fois, plutôt que de faire nôtres les paroles du Seigneur, nous avons fait passer nos idées pour ses paroles ! Que de fois les personnes sentent plus le poids de nos institutions que la présence amicale de Jésus ! Alors nous passons pour une ONG, pour une organisation semi-publique, et non pas pour la communauté des sauvés qui vivent la joie du Seigneur.
Écouter, se faire proches, témoigner. Le chemin de foi dans l’Évangile se termine d’une manière belle et surprenante, avec Jésus qui dit : « Va, ta foi t’a sauvé » (v. 52). Et pourtant, Bartimée n’a pas fait de profession de foi, il n’a accompli aucune œuvre ; il a seulement demandé pitié. Sentir qu’on a besoin du salut, c’est le commencement de la foi. C’est la voie directe pour rencontrer Jésus.
La foi qui a sauvé Bartimée n’était pas dans ses idées claires sur Dieu, mais dans le fait de le chercher, dans la volonté de le rencontrer. La foi est une question de rencontre, non pas de théorie. Dans la rencontre Jésus passe, dans la rencontre palpite le cœur de l’Église. Alors, non pas nos sermons, mais le témoignage de notre vie sera efficace.
Et à vous tous qui avez participé à ce « cheminement commun », je dis merci pour votre témoignage. Nous avons travaillé en communion et avec franchise, avec le désir de servir Dieu et son peuple. Que le Seigneur bénisse nos pas, afin que nous puissions écouter les jeunes, nous faire proches d’eux et leur témoigner la joie de notre vie : Jésus.
21.10.18
Sainte-Marthe : “Renonces-tu à Jésus-Christ ?”, la force d’un jeune martyr
Les trois formes de pauvreté du disciple
18 OCTOBRE 2018
PAPE FRANÇOIS
“Pour la dernière fois : renonces-tu à Jésus-Christ ?” A la messe de ce 18 octobre 2018 à Sainte-Marthe, le pape François a évoqué l’histoire d’un jeune chrétien récemment tué pour sa foi.
Dans son homélie rapportée par Vatican News, le pape a médité sur les « trois étapes » de la pauvreté demandée par Jésus aux disciples : être détaché des richesses est « la condition pour commencer ». Il faut pour cela avoir « un cœur pauvre ».
« Si dans le travail apostolique il faut des structures ou des organisations qui semblent être un signe de richesse, utilisez-les bien,a recommandé le pape, mais avec détachement… Si tu veux suivre le Seigneur, choisis la voie de la pauvreté, et si tu as des richesses parce que le Seigneur te les a données, (use-les) pour servir les autres, avec le cœur détaché. Le disciple ne doit pas avoir peur de la pauvreté, ou contraire : il doit être pauvre. »
La deuxième forme de pauvreté est de « recevoir humblement les persécutions, de tolérer les persécutions », les persécutions « de la calomnie, des rumeurs », les « jalousies », les « petites persécutions dans le quartier, en paroisse ».
Le pape a parlé aussi des persécutions physiques : « Hier, dans la Salle du Synode, un évêque de l’un de ces pays où il y a des persécutions, a raconté qu’un jeune catholique avait été pris par un groupe de jeunes qui haïssaient l’Eglise, des fondamentalistes : il a été battu puis jeté dans une citerne et ils lui lançaient de la boue et à la fin, quand la boue lui est arrivée au cou : “Pour la dernière fois : renonces-tu à Jésus-Christ ?” – “Non !”. Ils ont jeté une pierre et l’ont tué. Nous l’avons tous entendu. Et cela ne date pas des premiers siècles : c’est arrivé il y a deux mois ! C’est un exemple. Mais combien de chrétiens souffrent aujourd’hui de persécutions physiques : “Oh, il a blasphémé ! Au gibet !”. »
Ainsi finit le plus grand homme de l’Histoire
Troisième forme de pauvreté relevée par le pape : la solitude, l’abandon et surtout « la solitude de la fin », vécue par saint Paul dans la première lecture (2 Tm 4, 10-17b) : « Tous m’ont abandonné ». Et vécue par Jésus sur la croix : « Père, Père, pourquoi m’as-tu abandonné ? »
« Je pense au plus grand homme de l’humanité, a ajouté le pape, et cette qualification vient de la bouche de Jésus : Jean-Baptiste…. grand prédicateur, les gens allaient se faire baptiser par lui. Comment a-t-il fini ? Seul ; en prison… seul, oublié, égorgé par la faiblesse d’un roi, la haine d’une adultère et le caprice d’une jeune fille : ainsi finit le plus grand homme de l’Histoire. »
« Et sans aller si loin, a déploré le pape, si souvent dans les maisons de repos, il y a des prêtres et des religieuses qui ont dépensé leur vie dans la prédication, ils se sentent seuls, seuls avec le Seigneur : personne ne s’en souvient
20.08.18
Audience Générale Du 24/01/2018 © Vatican Media
Abus sexuels : « honte et repentir », le pape François écrit au Peuple de Dieu
« Rien ne doit être négligé » dans cette lutte (Texte intégral)
AOÛT 20, 2018 RÉDACTION PAPE FRANÇOIS
« Avec honte et repentir, en tant que communauté ecclésiale, nous reconnaissons que nous n’avons pas su être là où nous le devions, que nous n’avons pas agi en temps voulu en reconnaissant l’ampleur et la gravité du dommage qui était infligé à tant de vies. Nous avons négligé et abandonné les petits. » Dans une lettre sans précédent adressée au Peuple de Dieu, rendue publique le 20 août 2018, le pape François ne mâche pas ses mots en évoquant les scandales d’abus sexuels révélés ces derniers temps autour du globe. Il demande pardon pour ces « crimes ».
« Considérant le passé, écrit-il, ce que l’on peut faire pour demander pardon et réparation du dommage causé ne sera jamais suffisant. Considérant l’avenir, rien ne doit être négligé pour promouvoir une culture capable non seulement de faire en sorte que de telles situations ne se reproduisent pas mais encore que celles-ci ne puissent trouver de terrains propices pour être dissimulées et perpétuées ». Et le pape d’affirmer : « La douleur des victimes et de leurs familles est aussi notre douleur ». « Les blessures ne connaissent jamais de ‘prescription’, ajoute-t-il. La douleur de ces victimes est une plainte qui monte vers le ciel. »
Dans ce message publié en sept langues, le pape exhorte les fidèles à « lutter contre tout type de corruption, spécialement la corruption spirituelle » et à « condamner avec force ces atrocités et à redoubler d’efforts pour éradiquer cette culture de mort ». Il dénonce « une manière déviante de concevoir l’autorité dans l’Eglise – si commune dans nombre de communautés dans lesquelles se sont vérifiés des abus sexuels, des abus de pouvoir et de conscience » : le cléricalisme. « Dire non aux abus, c’est dire non, de façon catégorique, à toute forme de cléricalisme. »
Parmi les remèdes, le pape François invite « à l’exercice pénitentiel de la prière et du jeûne… pour réveiller notre conscience, notre solidarité et notre engagement en faveur d’une culture de la protection et du «jamais plus» à tout type et forme d’abus… la pénitence et la prière nous aideront à sensibiliser nos yeux et notre cœur à la souffrance de l’autre et à vaincre l’appétit de domination et de possession, très souvent à l’origine de ces maux ». « Demandons pardon pour nos propres péchés et pour ceux des autres. La conscience du péché nous aide à reconnaître les erreurs, les méfaits et les blessures générés dans le passé et nous donne de nous ouvrir et de nous engager davantage pour le présent sur le chemin d’une conversion renouvelée. »
AK
Lettre du Pape François au Peuple de Dieu
« Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui » (1 Cor 12,26). Ces paroles de saint Paul résonnent avec force en mon cœur alors que je constate, une fois encore, la souffrance vécue par de nombreux mineurs à cause d’abus sexuels, d’abus de pouvoir et de conscience, commis par un nombre important de clercs et de personnes consacrées. Un crime qui génère de profondes blessures faites de douleur et d’impuissance, en premier lieu chez les victimes, mais aussi chez leurs proches et dans toute la communauté, qu’elle soit composée de croyants ou d’incroyants. Considérant le passé, ce que l’on peut faire pour demander pardon et réparation du dommage causé ne sera jamais suffisant. Considérant l’avenir, rien ne doit être négligé pour promouvoir une culture capable non seulement de faire en sorte que de telles situations ne se reproduisent pas mais encore que celles-ci ne puissent trouver de terrains propices pour être dissimulées et perpétuées. La douleur des victimes et de leurs familles est aussi notre douleur ; pour cette raison, il est urgent de réaffirmer une fois encore notre engagement pour garantir la protection des mineurs et des adultes vulnérables.
1. Si un membre souffre
Ces derniers jours est paru un rapport détaillant le vécu d’au moins mille personnes qui ont été victimes d’abus sexuel, d’abus de pouvoir et de conscience, perpétrés par des prêtres pendant à peu près soixante-dix ans. Bien qu’on puisse dire que la majorité des cas appartient au passé, la douleur de nombre de ces victimes nous est parvenue au cours du temps et nous pouvons constater que les blessures infligées ne disparaissent jamais, ce qui nous oblige à condamner avec force ces atrocités et à redoubler d’efforts pour éradiquer cette culture de mort, les blessures ne connaissent jamais de «prescription». La douleur de ces victimes est une plainte qui monte vers le ciel, qui pénètre jusqu’à l’âme et qui, durant trop longtemps, a été ignorée, silencieuse ou passé sous silence. Mais leur cri a été plus fort que toutes les mesures qui ont entendu le réprimer ou bien qui, en même temps, prétendaient le faire cesser en prenant des décisions qui en augmentaient la gravité jusqu’à tomber dans la complicité. Un cri qui fut entendu par le Seigneur en nous montrant une fois encore de quel côté il veut se tenir. Le Cantique de Marie ne dit pas autre chose et comme un arrière-fond, continue à parcourir l’histoire parce que le Seigneur se souvient de la promesse faite à nos pères: «Il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles.Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides» (Lc 1, 51-53); et nous ressentons de la honte lorsque nous constatons que notre style de vie a démenti et dément ce que notre voix proclame.
Avec honte et repentir, en tant que communauté ecclésiale, nous reconnaissons que nous n’avons pas su être là où nous le devions, que nous n’avons pas agi en temps voulu en reconnaissant l’ampleur et la gravité du dommage qui était infligé à tant de vies. Nous avons négligé et abandonné les petits. Je fais miennes les paroles de l’alors cardinal Ratzinger lorsque, durant le Chemin de Croix écrit pour le Vendredi Saint de 2005, il s’unit au cri de douleur de tant de victimes en disant avec force: «Que de souillures dans l’Église, et particulièrement parmi ceux qui, dans le sacerdoce, devraient lui appartenir totalement ! Combien d’orgueil et d’autosuffisance ! […] La trahison des disciples, la réception indigne de son Corps et de son Sang sont certainement les plus grandes souffrances du Rédempteur, celles qui lui transpercent le cœur. Il ne nous reste plus qu’à lui adresser, du plus profond de notre âme, ce cri: Kyrie, eleison – Seigneur, sauve-nous (cf. Mt 8, 25)» (Neuvième Station).
2. Tous les membres souffrent avec lui
L’ampleur et la gravité des faits exigent que nous réagissions de manière globale et communautaire. S’il est important et nécessaire pour tout chemin de conversion de prendre connaissance de ce qui s’est passé, cela n’est pourtant pas suffisant. Aujourd’hui nous avons à relever le défi en tant que peuple de Dieu d’assumer la douleur de nos frères blessés dans leur chair et dans leur esprit. Si par le passé l’omission a pu être tenue pour une forme de réponse, nous voulons aujourd’hui que la solidarité, entendue dans son acception plus profonde et exigeante, caractérise notre façon de bâtir le présent et l’avenir, en un espace où les conflits, les tensions et surtout les victimes de tout type d’abus puissent trouver une main tendue qui les protège et les sauve de leur douleur (Cf. Exhort. ap. Evangelii Gaudium, n.228). Cette solidarité à son tour exige de nous que nous dénoncions tout ce qui met en péril l’intégrité de toute personne. Solidarité qui demande de lutter contre tout type de corruption, spécialement la corruption spirituelle, «car il s’agit d’un aveuglement confortable et autosuffisant où tout finit par sembler licite: la tromperie, la calomnie, l’égoïsme et d’autres formes subtiles d’autoréférentialité, puisque « Satan lui-même se déguise en ange de lumière » (2Co11,14) » (Exhort. ap. Gaudete et Exsultate, n.165). L’appel de saint Paul à souffrir avec celui qui souffre est le meilleur remède contre toute volonté de continuer à reproduire entre nous les paroles de Caïn: «Est-ce que je suis, moi, le gardien de mon frère?» (Gn 4,9).
Je suis conscient de l’effort et du travail réalisés en différentes parties du monde pour garantir et créer les médiations nécessaires pour apporter sécurité et protéger l’intégrité des mineurs et des adultes vulnérables, ainsi que de la mise en œuvre de la tolérance zéro et des façons de rendre compte de la part de tous ceux qui commettent ou dissimulent ces délits. Nous avons tardé dans l’application de ces mesures et sanctions si nécessaires, mais j’ai la conviction qu’elles aideront à garantir une plus grande culture de la protection pour le présent et l’avenir.
Conjointement à ces efforts, il est nécessaire que chaque baptisé se sente engagé dans la transformation ecclésiale et sociale dont nous avons tant besoin. Une telle transformation nécessite la conversion personnelle et communautaire et nous pousse à regarder dans la même direction que celle indiquée par le Seigneur. Ainsi saint Jean-Paul II se plaisait à dire: «Si nous sommes vraiment repartis de la contemplation du Christ, nous devrons savoir le découvrir surtout dans le visage de ceux auxquels il a voulu lui-même s’identifier» (Lett. ap. Novo Millenio Ineunte, n.49). Apprendre à regarder dans la même direction que le Seigneur, à être là où le Seigneur désire que nous soyons, à convertir notre cœur en sa présence. Pour cela, la prière et la pénitence nous aideront. J’invite tout le saint peuple fidèle de Dieu à l’exercice pénitentiel de la prière et du jeûne, conformément au commandement du Seigneur1, pour réveiller notre conscience, notre solidarité et notre engagement en faveur d’une culture de la protection et du «jamais plus» à tout type et forme d’abus.
Il est impossible d’imaginer une conversion de l’agir ecclésial sans la participation active de toutes les composantes du peuple de Dieu. Plus encore, chaque fois que nous avons tenté de supplanter, de faire taire, d’ignorer, de réduire le peuple de Dieu à de petites élites, nous avons construit des communautés, des projets, des choix théologiques, des spiritualités et des structures sans racine, sans mémoire, sans visage, sans corps et, en définitive, sans vie2. Cela se manifeste clairement dans une manière déviante de concevoir l’autorité dans l’Eglise – si commune dans nombre de communautés dans lesquelles se sont vérifiés des abus sexuels, des abus de pouvoir et de conscience – comme l’est le cléricalisme, cette attitude qui «annule non seulement la personnalité des chrétiens, mais tend également à diminuer et à sous-évaluer la grâce baptismale que l’Esprit Saint a placée dans le cœur de notre peuple»3. Le cléricalisme, favorisé par les prêtres eux-mêmes ou par les laïcs, engendre une scission dans le corps ecclésial qui encourage et aide à perpétuer beaucoup des maux que nous dénonçons aujourd’hui. Dire non aux abus, c’est dire non, de façon catégorique, à toute forme de cléricalisme.
Il est toujours bon de rappeler que le Seigneur, «dans l’histoire du salut, a sauvé un peuple. Il n’y a pas d’identité pleine sans l’appartenance à un peuple. C’est pourquoi personne n’est sauvé seul, en tant qu’individu isolé, mais Dieu nous attire en prenant en compte la trame complexe des relations interpersonnelles qui s’établissent dans la communauté humaine: Dieu a voulu entrer dans une dynamique populaire, dans la dynamique d’un peuple» (Exhort. ap. Gaudete et Exsultate, n.6). Ainsi, le seul chemin que nous ayons pour répondre à ce mal qui a gâché tant de vies est celui d’un devoir qui mobilise chacun et appartient à tous comme peuple de Dieu. Cette conscience de nous sentir membre d’un peuple et d’une histoire commune nous permettra de reconnaitre nos péchés et nos erreurs du passé avec une ouverture pénitentielle susceptible de nous laisser renouveler de l’intérieur.
Tout ce qui se fait pour éradiquer la culture de l’abus dans nos communautés sans la participation active de tous les membres de l’Eglise ne réussira pas à créer les dynamiques nécessaires pour obtenir une saine et effective transformation. La dimension pénitentielle du jeûne et de la prière nous aidera en tant que peuple de Dieu à nous mettre face au Seigneur et face à nos frères blessés, comme des pécheurs implorant le pardon et la grâce de la honte et de la conversion, et ainsi à élaborer des actions qui produisent des dynamismes en syntonie avec l’Evangile. Car «chaque fois que nous cherchons à revenir à la source pour récupérer la fraîcheur originale de l’Évangile, surgissent de nouvelles voies, des méthodes créatives, d’autres formes d’expression, des signes plus éloquents, des paroles chargées de sens renouvelé pour le monde d’aujourd’hui» (Exhort. ap. Evangelii Gaudium, n.11).
Il est essentiel que, comme Eglise, nous puissions reconnaitre et condamner avec douleur et honte les atrocités commises par des personnes consacrées, par des membres du clergé, mais aussi par tous ceux qui ont la mission de veiller sur les plus vulnérables et de les protéger. Demandons pardon pour nos propres péchés et pour ceux des autres. La conscience du péché nous aide à reconnaitre les erreurs, les méfaits et les blessures générés dans le passé et nous donne de nous ouvrir et de nous engager davantage pour le présent sur le chemin d’une conversion renouvelée.
En même temps, la pénitence et la prière nous aideront à sensibiliser nos yeux et notre cœur à la souffrance de l’autre et à vaincre l’appétit de domination et de possession, très souvent à l’origine de ces maux. Que le jeûne et la prière ouvrent nos oreilles à la douleur silencieuse des enfants, des jeunes et des personnes handicapées. Que le jeûne nous donne faim et soif de justice et nous pousse à marcher dans la vérité en soutenant toutes les médiations judiciaires qui sont nécessaires. Un jeûne qui nous secoue et nous fasse nous engager dans la vérité et dans la charité envers tous les hommes de bonne volonté et envers la société en général, afin de lutter contre tout type d’abus sexuel, d’abus de pouvoir et de conscience.
De cette façon, nous pourrons rendre transparente la vocation à laquelle nous avons été appelés d’être «le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain» (Conc. OEcum. Vat.II, Lumen Gentium, n.1).
« Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui », nous disait saint Paul. Au moyen de la prière et de la pénitence, nous pourrons entrer en syntonie personnelle et communautaire avec cette exhortation afin que grandisse parmi nous le don de la compassion, de la justice, de la prévention et de la réparation. Marie a su se tenir au pied de la croix de son fils. Elle ne l’a pas fait de n’importe quelle manière mais bien en se tenant fermement debout et à son coté. Par cette attitude, elle exprime sa façon de se tenir dans la vie. Lorsque nous faisons l’expérience de la désolation que nous causent ces plaies ecclésiales, avec Marie il est nous bon «de donner plus de temps à la prière» (S. Ignace de Loyola, Exercices Spirituels, 319),cherchant à grandir davantage dans l’amour et la fidélité à l’Eglise. Elle, la première disciple, montre à nous tous qui sommes disciples comment nous devons nous comporter face à la souffrance de l’innocent, sans fuir et sans pusillanimité. Contempler Marie c’est apprendre à découvrir où et comment le disciple du Christ doit se tenir.
Que l’Esprit Saint nous donne la grâce de la conversion et l’onction intérieure pour pouvoir exprimer, devant ces crimes d’abus, notre compassion et notre décision de lutter avec courage.
Du Vatican, le 20 août 2018.
FRANÇOIS
________________________
1 «Mais cette sortede démonsne se chasse que par la prière et par le jeûne» (Mt 17,21).
2 Cf. Lettre au peuple de Dieu en marche au Chili, 31 mai 2018.
3 Lettre au Cardinal Marc Ouellet, Président de la Commission Pontificale pour l’Amérique Latine, 19 mars 2016.
© Librairie éditrice du Vatican
22.05.18
Sainte-Marthe : si l’Eglise n’est pas féminine, c’est une Eglise de « vieux garçons »
Homélie pour la mémoire liturgique de « Marie, Mère de l’Église »
MAI 22, 2018
L’Eglise est « féminine » et si ce trait lui fait défaut, elle devient « une association de bienfaisance ou une équipe de foot » : une « Eglise masculine », c’est « une Eglise de vieux garçons… incapables d’amour », a affirmé le pape François durant la messe matinale du 21 mai 2018, à la Maison Sainte-Marthe.
Selon de nouvelles dispositions approuvées par le pape, l’Eglise célébrait pour la première fois ce jour-là, lundi de Pentecôte, la mémoire liturgique obligatoire de la Vierge Marie sous le vocable de « Marie, Mère de l’Église ».
Dans l’homélie rapportée par Vatican News en italien, le pape a fait observer que dans les Evangiles, Marie était appelée « Mère de Jésus » et jamais « veuve de Joseph » : ainsi c’est sa « maternité » qui parcourt les Ecritures.
« L’Eglise est féminine par qu’elle est ‘église’, ‘épouse’… Et elle est mère, elle met au monde. Epouse et mère » : une caractéristique qui se comprend à la lumière « de Marie, qui est Mère de l’Eglise ». Si tel n’est pas le cas, « l’Eglise perd sa véritable identité et devient une association de bienfaisance ou une équipe de foot… mais pas l’Eglise », a-t-il averti.
Seule une Eglise féminine peut avoir de la « fécondité », a ajouté le pape : « L’important est que l’Eglise soit femme, qu’elle ait cette attitude d’épouse et de mère. Quand nous oublions cela, c’est une Eglise masculine, sans cette dimension, et tristement elle devient une Eglise de vieux garçons, qui vivent dans l’isolement, incapables d’amour, incapables de fécondité. Sans la femme, l’Eglise n’avance pas, car elle est femme. Et cette attitude de femme lui vient de Marie. »
Pour le pape, une des vertus qui distinguent la femme est la tendresse : « Une Eglise qui est mère marche sur le chemin de la tendresse. Elle connaît le langage de la sagesse des caresses, du silence, du regard qui sait avoir compassion, qui sait faire silence. »
Toute âme, toute personne « qui vit cette appartenance à l’Eglise » est de même appelée à être « une personne douce, tendre, souriante, pleine d’amour », a-t-il conclu.
MAI 22, 2018 PAPE FRANÇOIS
13.05.18
Attention au diable, ce « chien enragé qui mord »
Isabelle Cousturié | 09 mai 2018
À Sainte-Marthe, le pape François a lancé une nouvelle mise en garde contre les "coups de queue" du démon qui se sait condamné mais persiste à séduire.
Le chrétien ne peut rien attendre du démon, de ce tentateur, de ce « chien enchainé, plein de rage, qui mord », de ce menteur, a réaffirmé avec vigueur le pape François lors de son homélie à la Maison Sainte-Marthe, le 8 mai dernier. « Nous ne devons pas l’approcher, ni parler avec lui », a prévenu le Pape. C’est un « perdant », mais « il reste dangereux » et son « coup de queue » peut être effroyable, a-t-il mis en garde pour décrire la dangerosité des moyens utilisés par Satan pour porter les hommes au péché.
« Et nous, idiots, nous le croyons »
Si le diable est capable de « massacres », il est néanmoins un « moribond », conformément à ce qu’enseigne l’Église avec la résurrection du Christ, vainqueur de la mort, explique le Pape dans son homélie. Satan se sait « condamné » et c’est pourquoi il est encore plus dangereux. Condamné, il continue de séduire ? Oui, « difficile à comprendre », reconnaît le Pape, mais il a cette capacité. Il sait qu’il a perdu mais agit en vainqueur. « Le diable promet beaucoup de choses, présente des cadeaux emballés dans du beau papier mais nous ignorons ce qu’il y a à l’intérieur ».
Lire aussi : Le pape François dans l’enfer des raccourcis médiatiques
Il sait que l’homme est curieux, vaniteux, et sait comment se présenter à lui, avec tout un tas de propositions qui » ne sont que des mensonges ». Et d’insister, « n’oublions pas que Satan est le père du mensonge », un « grand menteur » qui « sait bien parler » mais seulement pour mieux « tromper ». Le problème c’est que l’homme « aime être séduit » et peut tomber facilement dans la tentation. Satan promet, nous ment, et nous, comme « des idiots, nous le croyons ! ».
Veiller, prier, jeûner
La lumière de Satan est fulgurante « comme un feu d’artifice », poursuit le Pape, mais elle finit par s’évanouir. Ce n’est pas comme la lumière de Dieu qui, elle, est « douce » et « permanente ». Et le Saint-Père de rappeler alors les trois clefs de Jésus pour lutter et vaincre ses tentations : veiller, prier et jeûner. « Ne jamais entrer en dialogue » avec Satan, renchérit le Pape fermement, « ne pas s’en approcher », et aller se réfugier dans les bras de la Mère, comme les enfants qui « lorsqu’ils ont peur vont trouver leur mère »… « Maman, maman… J’ai peur ! ». Avoir recours à la Vierge Marie qui « veille sur nous ». Comme disent les Pères de l’Église, surtout les mystiques russes, lors de tourments spirituels « se réfugier sous le manteau de la grande Mère de Dieu ». Car la Vierge Marie, conclut le Pape, « nous aide dans cette lutte contre le chien enchainé pour le vaincre ».
01.04.18
Message pascal du pape François
Chers frères et sœurs, bonne fête de Pâques !
Jésus est ressuscité d’entre les morts…
Cette annonce résonne dans l’Église par le monde entier, avec le chant de l’Alleluia : Jésus est le Seigneur, le Père l’a ressuscité et il est vivant pour toujours au milieu de nous. Jésus lui-même avait annoncé à l’avance sa mort et sa résurrection avec l’image du grain de blé. Il disait : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12, 24). Voilà, justement cela est arrivé : Jésus, le grain de blé semé par Dieu dans les sillons de la terre, est mort tué par le péché du monde, il est resté deux jours dans le tombeau ; mais dans sa mort était contenue toute la puissance de l’amour de Dieu, qui s’est dégagée et qui s’est manifestée le troisième jour, celui que nous célébrons aujourd’hui : la Pâque du Christ Seigneur.
Nous chrétiens, nous croyons et nous savons que la résurrection du Christ est la véritable espérance du monde, celle qui ne déçoit pas. C’est la force du grain de blé, celle de l’amour qui s’abaisse et qui se donne jusqu’au bout, et qui renouvelle vraiment le monde. Cette force porte du fruit aussi aujourd’hui dans les sillons de notre histoire, marquée de tant d’injustices et de violences.
Elle porte des fruits d’espérance et de dignité là où il y a de la misère et de l’exclusion, là où il y a la faim et où manque le travail, au milieu des personnes déplacées et des réfugiés – tant de fois rejetés par la culture actuelle du rebut –, aux victimes du narcotrafic, de la traite des personnes et des esclavages de notre temps.
Et nous aujourd’hui, demandons des fruits de paix pour le monde entier, à commencer par la bien-aimée et tourmentée Syrie, dont la population est épuisée par une guerre qui ne voit pas de fin.
En cette fête de Pâques, que la lumière du Christ Ressuscité éclaire les consciences de tous les responsables politiques et militaires, afin que soit mis un terme immédiatement à l’extermination en cours, que soit respecté le droit humanitaire et qu’il soit pourvu à faciliter l’accès aux aides dont ces frères et sœurs ont un urgent besoin, assurant en même temps des conditions convenables pour le retour de tous ceux qui ont été dispersés.
Invoquons des fruits de réconciliation pour la Terre Sainte, blessée encore ces jours-ci par des conflits ouverts qui n’épargnent pas les personnes sans défense, pour le Yémen et pour tout le Moyen Orient, afin que le dialogue et le respect réciproque prévalent sur les divisions et sur la violence. Puissent nos frères en Christ, qui souvent subissent brimades et persécutions, être des témoins lumineux du Ressuscité et de la victoire du bien sur le mal.
Demandons instamment des fruits d’espérance en ce jour pour tous ceux qui aspirent à une vie plus digne, surtout dans ces parties du continent africain tourmentées par la faim, par des conflits endémiques et par le terrorisme. Que la paix du Ressuscité guérisse les blessures au Sud Soudan et dans la République Démocratique du Congo tourmentée : qu’elle ouvre les cœurs au dialogue et à la compréhension réciproque. N’oublions pas les victimes de ces conflits, surtout les enfants ! Que ne manque pas la solidarité pour les nombreuses personnes contraintes à abandonner leurs terres et privées du minimum nécessaire pour vivre.
Implorons des fruits de dialogue pour la péninsule coréenne, pour que les entretiens en cours promeuvent l’harmonie et la pacification de la région. Que ceux qui ont des responsabilités directes agissent avec sagesse et discernement pour promouvoir le bien du peuple coréen et construire des relations de confiance au sein de la communauté internationale.
Demandons des fruits de paix pour l’Ukraine, afin que se renforcent les pas en faveur de la concorde et soient facilitées les initiatives humanitaires dont la population a besoin.
Appelons des fruits de consolation pour le peuple vénézuélien, qui – comme l’ont écrit ses pasteurs – vit dans une espèce de « terre étrangère » dans son propre pays. Puisse-t-il, par la force de la Résurrection du Seigneur Jésus, trouver le chemin juste, pacifique et humain pour sortir au plus vite de la crise politique et humanitaire qui le tenaille, et que accueil et assistance ne manquent pas à tous ceux de ses enfants qui sont contraints d’abandonner leur patrie.
Que le Christ Ressuscité apporte des fruits de vie nouvelle aux enfants qui, à cause des guerres et de la faim, grandissent sans espérance, privés d’éducation et d’assistance sanitaire ; et aussi pour les aînés mis à l’écart par la culture égoïste, qui met de côté celui qui n’est pas «productif».
Invoquons des fruits de sagesse pour ceux qui dans le monde entier ont des responsabilités politiques, afin qu’ils respectent toujours la dignité humaine, se prodiguent avec dévouement au service du bien commun et assurent développement et sécurité à leurs propres citoyens.
Chers frères et sœurs,
A nous aussi, comme aux femmes accourues au tombeau, sont adressées ces paroles : « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, il est ressuscité ! » (Lc 24, 5-6). La mort, la solitude et la peur ne sont plus la parole ultime. Il y a une parole qui va au-delà et que Dieu seul peut prononcer : c’est la parole de la Résurrection (cf. Jean-Paul II, Paroles au terme de la Via Crucis, 18 avril 2003). Avec la force de l’amour de Dieu, elle « chasse les crimes et lave les fautes, rend l’innocence aux coupables et l’allégresse aux affligés, dissipe la haine, dispose à l’amitié et soumet toute puissance » (Annonce de la Pâque).
Bonne fête de Pâques à tous !
© Librairie éditrice du Vatican
31.03.18
Voler le paradis, comme le Bon Larron à genoux devant la miséricorde! (traduction complète)
Prière du pape François au terme du Chemin de Croix
30 MARS 2018 ANITA BOURDIN PAPE FRANÇOIS
Chemin de Croix au Colisée 2018 © Vatican Media
«Seigneur Jésus, donne-nous toujours la grâce de la sainte honte! (…) Donne-nous toujours la grâce de la sainte repentance! (…) Ton amour est notre espérance. Seigneur Jésus, donne-nous toujours la grâce de la sainte espérance!» : telle la prière du pape François au terme du Chemin de Croix de ce Vendredi Saint, au Colisée. Pour le pape, l’enjeu, c’est de « voler le paradis », comme le Bon Larron, « à genoux devant la miséricorde » de Jésus.
Le pape François a présidé ce traditionnel Chemin de Croix, diffusé en mondovision à 21h15, ce vendredi 30 mars 2018, au cœur de la Rome historique. Quelque 20 000 personnes y ont participé, selon les chiffres de la gendarmerie vaticane.
Les méditations et les prières proposées cette année pour les stations de ce Chemin de Croix ont été préparées par un groupe de jeunes étudiants d’un lycée romain coordonné par leur professeur de religion, Andrea Monda. Les jeunes ont témoigné de leur engagement. Ils parlent d’une expérience inoubliable.
Au long des quatorze stations, la croix a été portée alternativement par le vicaire du pape pour Rome, Mgr Angelo De Donatis – au début et à la fin -, par les jeunes qui ont composé les méditations, par la famille de leur professeur, par une famille de Syrie, Riad Sargi et Rouba Farah, et leurs trois enfants, par des religieuses dominicaines d’Irak, sr Alkhayat Leya et sr Hikma E. Hanna, et un religieux trinitaire, le p. José Narlaly, par deux frères franciscains de la Custodie de Terre Sainte, Antonio D’Aniello et Elivano Luiz da Silva, et par quatre bénévoles de l’UNITALSI, qui organise les voyages des malades à Lourdes et dans d’autres sanctuaires. Des jeunes du diocèse de Rome et de l’Association des Saints Pierre et Paul portaient les flambeaux.
A son arrivée et avant de repartir, le pape François a salué la maire de Rome, Mme Virginia Raggi. Et, avant de remonter en voiture pour rentrer au Vatican, il a également salué chacun des jeunes qui ont composé les méditations, présentés par le prof. Monda et son épouse: le pape s’est attardé à parler avec eux.
Voici notre traduction rapide, de travail, de l’italien, de la prière composée par le pape François, et qu’il a exprimée au terme du Chemin de Croix.
AB
Prière du pape François
Seigneur Jésus, notre regard se tourne vers toi, plein de honte, de repentance et d’espérance.
Devant ton amour suprême, nous sommes envahis par la honte de t’avoir laissé souffrir seul pour nos péchés:
honte d’avoir fui devant l’épreuve, alors que nous t’avions dit mille fois: « même si tous t’abandonnent, je ne t’abandonnerai jamais »;
honte d’avoir choisi Barabbas et pas toi, le pouvoir et pas toi, l’apparence et pas toi, le dieu de l’argent et pas toi, la mondanité et pas l’éternité;
honte de t’avoir tenté par nos lèvres et par notre cœur, à chaque fois que nous nous sommes retrouvés devant une épreuve, et que nous t’avons dit: « si tu es le messie, sauve-toi et nous croirons! »;
honte parce que tant de gens, et même certains de tes ministres, se sont laissés tromper par l’ambition et la vaine gloire, perdant leur dignité et leur premier amour;
honte parce que nos générations laissent aux jeunes un monde fracturé par les divisions et par les guerres; un monde dévoré par l’égoïsme où les jeunes, les petits, les malades, les personnes âgées sont marginalisés;
honte d’avoir perdu la honte;
Seigneur Jésus, donne-nous toujours la grâce de la sainte honte!
Notre regard est également plein d’une repentance qui, avant ton éloquent silence, supplie ta miséricorde:
repentance qui jaillit de la certitude que toi seul peux nous guérir du mal, toi seul peux nous guérir de notre lèpre de haine, d’égoïsme, d’orgueil, d’avidité, de vengeance, de cupidité, d’idolâtrie, toi seul peux nous embrasser à nouveau en nous restituant notre dignité filiale et te réjouir de notre retour à la maison, à la vie;
repentance qui jaillit du sentiment de notre petitesse, de notre néant, de notre vanité et qui se laisse caresser par ta douce et puissante invitation à la conversion;
repentance de David qui, depuis l’abîme de sa misère, trouve sa seule force toi;
repentance qui naît de notre honte, qui naît de la certitude que notre cœur restera toujours inquiet jusqu’à ce qu’il te trouve, et, en toi, sa seule source de plénitude et de repos;
repentance de Pierre qui, en rencontrant ton regard, a pleuré amèrement de t’avoir renié devant les hommes.
Seigneur Jésus, donne-nous toujours la grâce de la sainte repentance!
Devant ta majesté suprême, dans notre désespoir ténébreux, l’étincelle de l’espérance s’allume, parce que nous savons que ta mesure pour nous aimer est seulement de nous aimer sans mesure;
espérance, parce que ton message continue à inspirer, aujourd’hui encore, tant de personnes et de peuples pour qui seul le bien peut vaincre le mal et la méchanceté, seul le pardon peut détruire la rancœur et la vengeance, pour qui c’est seulement en s’embrassant fraternellement que l’on peut faire disparaître l’hostilité et la peur de l’autre;
espérance parce que ton sacrifice continue, aujourd’hui encore, à exhaler le parfum de l’amour divin comme une caresse sur le cœur de nombreux jeunes qui continuent à te consacrer leur vie et deviennent des exemples vivants de charité et de gratuité dans notre monde dévoré par la logique du profit et du gain facile;
espérance parce que tant de missionnaires, hommes et femmes, continuent, aujourd’hui encore, à défier la conscience endormie de l’humanité, en risquant leur vie pour te servir dans les pauvres, dans les mis au rebut, dans les immigrés, dans les invisibles, dans les exploités, dans les affamés et dans les détenus;
espérance parce que ton Église, sainte et composée de pécheurs, continue, aujourd’hui encore, malgré toutes les tentatives pour la discréditer, d’être une lumière qui éclaire, encourage, élève et témoigne de ton amour sans limites, pour l’humanité, modèle d’altruisme, arche de salut et source de certitude et vérité;
espérance parce que de ta croix, fruit de la cupidité et de la lâcheté de tant de docteurs de la Loi et d’hypocrites, a jailli la résurrection, transformant les ténèbres du tombeau en éclair de l’aube du dimanche sans couchant, nous enseignant que ton amour est notre espérance.
Seigneur Jésus, donne-nous toujours la grâce de la sainte espérance!
Aide-nous, Fils de l’homme, à nous dépouiller de l’arrogance du larron qui est à ta gauche et des myopes et des corrompus, qui n’ont vu en toi qu’une occasion à exploiter, un condamné à critiquer, un vaincu dont se moquer, une autre occasion de faire endosser leur fautes aux autres, y compris à Dieu.
Nous te demandons au contraire, Fils de Dieu, de nous identifier avec le bon larron qui t’a regardé de ses yeux pleins de honte, de repentance et d’espérance; lui qui, par les yeux de la foi, a vu dans ta défaite apparente la victoire divine et qui s’est ainsi agenouillé devant ta miséricorde et, par son honnêteté, a volé le paradis! Amen!
Traduction de ZENIT , Anita Bourdin
18.03.18
Entre dans les plaies de Jésus «jusqu’à son cœur»: paroles du pape François avant l’angélus (traduction complète)
La croix n’est pas un accessoire vestimentaire
18 MARS 2018 ANITA BOURDIN ANGÉLUS ET REGINA CAELI, PAPE FRANÇOIS
Angélus 18/03/2018, capture @ Vatican Media
Paroles du pape François avant l’angélus
Chers frères et sœurs, bonjour!
L’Evangile d’aujourd’hui (cf. Jn 12, 20-33) raconte un épisode survenu dans les derniers jours de la vie de Jésus. La scène se déroule à Jérusalem, où il se trouve pour la fête de la Pâque juive.
Quelques Grecs sont également arrivés pour cette célébration rituelle; il s’agit d’hommes animés par des sentiments religieux, attirés par la foi du peuple juif, et qui, ayant entendu parler de ce grand prophète, s’approchent de Philippe, l’un des douze apôtres, et lui disent: « Nous voulons voir Jésus » (v. 21). Jean met en relief cette phrase, centrée sur le verbe voir, qui, dans le vocabulaire de l’évangéliste signifie aller au-delà des apparences pour saisir le mystère d’une personne. Le verbe que Jean emploie, « voir », c’est arriver jusqu’au cœur, arriver, par la vue, par la compréhension, jusqu’à l’intime de la personne, à l’intérieur de la personne.
La réaction de Jésus est surprenante. Il ne répond pas par un « oui » ou un « non », mais il dit: « L’heure est venue pour le Fils de l’homme d’être glorifié » (v. 23). Ces paroles, qui semblent, à première vue, ignorer la question de ces Grecs, donnent en réalité la vraie réponse, parce que qui veut connaître Jésus doit regarder à l’intérieur de la croix, où se révèle sa gloire.
Regarder à l’intérieur de la croix. L’Évangile d’aujourd’hui nous invite à tourner notre regard vers le crucifix, qui n’est pas un objet ornemental ou un accessoire vestimentaire – dont on abuse parfois! – mais un signe religieux à contempler et à comprendre.
Dans l’image de Jésus crucifié se révèle le mystère de la mort du Fils comme acte suprême d’amour, source de vie et de salut pour l’humanité de tous les temps. Dans ses plaies, nous avons été guéris.
Je peux penser : « Comment est-ce que je regarde le crucifix ? Comme une œuvre d’art, pour voir s’il est beau ou pas beau ? Ou je regarde à l’intérieur, est-ce que j’entre dans les plaies de Jésus jusqu’à son cœur ? Je regarde le mystère de Dieu anéanti jusqu’à la mort, comme un esclave, comme un criminel ? » N’oubliez pas ceci : regarder le crucifix, mais le regarder à l’intérieur. Il y a cette belle dévotion de prier une Notre Père pour chacune des cinq plaies : quand nous prions ce Notre Père, cherchons à entrer à travers les plaies de Jésus, à l’intérieur, à l’intérieur, justement à son cœur. Et là nous apprendrons la grande sagesse du mystère du Christ, la grande sagesse de la croix.
Et pour expliquer la signification de sa mort et de sa résurrection, Jésus utilise une image et il dit: « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (v. 24). Il veut faire comprendre que son événement extrême – c’est-à-dire la croix, mort et résurrection – est un acte de fécondité – ses plaies nous ont guéris –, une fécondité qui portera du fruit pour beaucoup. Il se compare ainsi lui-même à un grain de blé qui pourrit dans la terre et génère une vie nouvelle. Par l’Incarnation, Jésus est venu sur la terre; mais cela ne suffit pas: Il doit aussi mourir, pour racheter les hommes de l’esclavage du péché et leur en donner une vie nouvelle réconciliée dans l’amour. J’ai dit : « pour racheter les hommes », mais, pour me racheter moi, toi, nous tous, chacun de nous, Lui il a payé ce prix. Voilà le mystère du Christ. Va vers ses plaies, entre, contemple ; vois Jésus, mais de l’intérieur.
Et ce dynamisme du grain de blé, accompli en Jésus, doit aussi se réaliser en nous, ses disciples: nous sommes appelés à faire nôtre cette loi pascale de perdre notre vie pour la recevoir nouvelle et éternelle. Et qu’est-ce que cela signifie que perdre sa vie ? C’est-à-dire, que signifie être le grain de blé? Cela signifie moins penser à soi-même, à ses intérêts personnels, et savoir « voir » et répondre aux besoins de notre prochain, spécialement des laissés-pour-compte. Accomplir avec joie des œuvres de charité envers ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur esprit c’est la façon la plus authentique pour vivre l’Évangile, c’est le fondement nécessaire à la croissance de nos communautés dans la fraternité et dans l’accueil mutuel.
Que la Vierge Marie, qui a toujours gardé le regard du œur fixé sur son Fils, de la mangeoire de Bethléem jusqu’à la croix au Calvaire, nous aide à le rencontrer et à le connaître comme Il le veut, afin que nous puissions vivre éclairés par Lui, et porter dans le monde des fruits de justice et de paix.
Angelus Domini…
© Traduction de ZENIT, Anita Bourdin
07.03.18
Catéchèse : l’Eucharistie, « c’est le Corps de Jésus ; c’est tout »
La messe ne se paye pas, la rédemption est gratuite (Traduction intégrale)
7 MARS 2018 HÉLÈNE GINABAT AUDIENCE GÉNÉRALE, PAPE FRANÇOIS
Messe À Sainte-Marthe © Vatican Media
L’Eucharistie, affirme le pape François à l’audience générale, « c’est le Corps de Jésus ; c’est tout ». Nous n’avons pas besoin de nous poser de questions, explique-t-il. « La foi vient à notre aide ; par un acte de foi, nous croyons que c’est le corps et le sang de Jésus. C’est le “mystère de la foi”, comme nous le disons après la consécration. Le prêtre dit : “Mystère de la foi” et nous répondons par une acclamation ».
L’audience générale de ce mercredi 7 mars 2018 a eu lieu dans la Salle Paul VI, tandis que de très nombreux pèlerins y participaient en direct par vidéo dans la basilique Saint-Pierre, en raison de l’affluence. Le pape est allé les y saluer au terme de la rencontre. Poursuivant son cycle de catéchèse sur la messe, le pape François s’est centré sur la prière eucharistique, qui « qualifie la célébration de la messe et en constitue le moment central, ordonné à la sainte communion ».
Le pape a aussi évoqué la possibilité de faire dire la messe pour une intention particulière : « “Père, combien dois-je payer pour que mon nom soit prononcé ici ? – Rien !”. C’est compris ? Rien ! La messe ne se paye pas. La messe est le sacrifice du Christ, qui est gratuit. La rédemption est gratuite. Si tu veux faire une offrande, fais-la, mais ce n’est pas payant. C’est important de comprendre cela. »
Voici notre traduction intégrale de la catéchèse du pape.
HG
Catéchèse du pape François (traduction intégrale)
Chers frères et sœurs, bonjour !
Nous continuons les catéchèses sur la messe et, dans cette catéchèse, nous nous arrêtons sur la prière eucharistique. Une fois conclu le rite e la présentation du pain et du vin, commence la prière eucharistique, qui qualifie la célébration de la messe et en constitue le moment central, ordonné à la sainte communion. Elle correspond à ce que Jésus lui-même a fait, à table avec les apôtres lors de la dernière Cène, quand il « rendit grâce » pour le pain, et ensuite pour le calice du vin (cf. Mt 26,27 ; Mc 14,23 ; Lc, 22,17.19 ; 1 Cor 11,24) : son action de grâce revit dans chacune de nos Eucharisties, en nous associant à son sacrifice du salut.
Et dans cette prière solennelle – la prière eucharistique est solennelle – l’Église exprime ce qu’elle accomplit quand elle célèbre l’Eucharistie et le motif pour lequel elle la célèbre, à savoir faire communion avec le Christ réellement présent dans le pain et dans le vin consacrés. Après avoir invité le peuple à élever son cœur vers le Seigneur et à lui rendre grâce, le prêtre prononce la prière à haute voix, au nom de toutes les personnes présentes, en s’adressant au Père par l’intermédiaire de Jésus-Christ dans l’Esprit Saint. « Cette prière signifie que toute l’assemblée des fidèles s’unit au Christ pour magnifier les grandes œuvres de Dieu et pour offrir le sacrifice » (Présentation générale du Missel romain, 78). Et pour s’unir, elle doit comprendre. C’est pourquoi l’Église a voulu célébrer la messe dans la langue que comprennent les gens, afin que chacun puisse s’unir à cette louange et à cette grande prière avec le prêtre. En vérité, « le sacrifice du Christ et le sacrifice de l’Eucharistie sont un unique sacrifice » (Catéchisme de l’Église catholique, 1367).
Dans le Missel, on trouve différentes formules de prière eucharistique, toutes constituées par des éléments caractéristiques, que je voudrais maintenant rappeler (cf. PGMR, 79 ; CEC, 1352-1354). Elles sont toutes très belles. Avant tout, il y a la préface, qui est une action de grâce pour les dons de Dieu, en particulier pour avoir envoyé son Fils comme notre Sauveur. La préface se conclut par l’acclamation du Sanctus, normalement chanté. Il est beau de chanter le Sanctus : « Saint, saint, saint le Seigneur ». Il est beau de le chanter. Toute l’assemblée unit sa voix à celle des anges et des saints pour louer et glorifier Dieu.
Il y a ensuite l’invocation de l’Esprit afin que, par sa puissance, il consacre le pain et le vin. Nous invoquons l’Esprit pour qu’il vienne et qu’il y ait Jésus dans le pain et le vin. L’action de l’Esprit Saint et l’efficacité des paroles mêmes du Christ, proférées par le prêtre, rendent réellement présents, sous les espèces du pain et du vin, son Corps et son Sang, son sacrifice offert sur la croix une fois pour toutes (cf. CEC, 1375). Jésus, sur ce point, a été très clair. Nous avons entendu comment saint Paul, au début, raconte les paroles de Jésus : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang ». « Ceci est mon sang, ceci est mon corps ». C’est Jésus lui-même qui a dit cela. Nous ne devons pas nous poser des questions étranges : « Mais comment est-ce possible, une telle chose… ». C’est le Corps de Jésus ; c’est tout. La foi : la foi vient à notre aide ; par un acte de foi, nous croyons que c’est le corps et le sang de Jésus. C’est le « mystère de la foi », comme nous le disons après la consécration. Le prêtre dit : « Mystère de la foi » et nous répondons par une acclamation. En célébrant le mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur, dans l’attente de son retour glorieux, l’Église offre au Père le sacrifice qui réconcilie le ciel et la terre : elle offre le sacrifice pascal du Christ en s’offrant avec lui et en demandant, en vertu de l’Esprit Saint, de devenir « dans le Christ un seul corps et un seul esprit » (Prière eucharistique III ; cf. Sacrosanctum Concilium, 48 ; PGMR, 79f). L’Église veut nous unir au Christ et devenir avec le Seigneur un seul corps et un seul esprit. C’est cela, la grâce et le fruit de la communion sacramentelle : nous nous nourrissons du Corps du Christ pour devenir, nous qui en mangeons, son Corps vivant aujourd’hui dans le monde.
C’est un mystère de communion, l’Église s’unit à l’offrande du Christ et à son intercession et, dans cette lumière, « dans les catacombes, l’Église est souvent représentée comme une femme en prière, les bras grands-ouverts, dans une attitude de prière, l’Église qui prie. C’est beau de penser que l’Église prie. Il y a un passage dans le Livre des Actes des apôtres ; quand Pierre était en prison, la communauté chrétienne dit : « Elle priait sans cesse pour lui ». L’Église qui prie, l’Église priante. Et quand nous allons à la messe, c’est pour faire cela : être l’Église qui prie. « De même que le Christ a étendu les bras sur la croix, ainsi, par lui, avec lui et en lui, l’Église s’offre et intercède pour tous les hommes » (CEC, 1368).
La prière eucharistique demande à Dieu de rassembler tous ses enfants dans la perfection de l’amour, en union avec le pape et l’évêque, mentionnés par leur nom, signe que nous célébrons en communion avec l’Église universelle et avec l’Église particulière. La supplication, comme l’offrande, est présentée à Dieu pour tous les membres de l’Église, les vivants et les défunts, dans l’attente de la bienheureuse espérance de partager l’héritage éternel du ciel, avec la Vierge Marie (cf. CEC, 1369-1371). Personne ni rien n’est oublié dans la prière eucharistique, mais tout est reconduit à Dieu, comme le rappelle la doxologie qui la conclut. Personne n’est oublié. Et si j’ai quelqu’un, des parents, des amis, qui sont dans le besoin ou qui sont passés de ce monde à l’autre, je peux les nommer à ce moment, intérieurement et dans le silence, ou faire écrire que son nom soit prononcé. « Père, combien dois-je payer pour que mon nom soit prononcé ici ? – Rien ! ». C’est compris ? Rien ! La messe ne se paye pas. La messe est le sacrifice du Christ, qui est gratuit. La rédemption est gratuite. Si tu veux faire une offrande, fais-la, mais ce n’est pas payant. C’est important de comprendre cela.
Cette formule codifiée de prière, peut-être pouvons-nous la sentir un peu lointaine – c’est vrai, c’est une formule ancienne – mais si nous en comprenons bien la signification, alors nous participerons certainement mieux. En effet, elle exprime tout ce que nous accomplissons dans la célébration eucharistique ; et en outre, elle nous enseigne à cultiver trois attitudes qui ne devraient jamais manquer chez les disciples de Jésus. Les trois attitudes : premièrement, apprendre à « rendre grâce, toujours et en tout lieu » et pas seulement à certaines occasions, quand tout va bien. Deuxièmement, faire de notre vie un don d’amour, libre et gratuit ; troisièmement, construire la communion concrète, dans l’Église et avec tous. Cette prière centrale de la messe nous éduque nous, petit à petit, à faire de toute notre vie une « Eucharistie », c’est-à-dire une action de grâce.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat
24.02.18
Sans Marie, l’Église risque de «se déshumaniser»: conclusion de retraite du pape à Ariccia
La béatitude de la soif
23 FÉVRIER 2018 ANITA BOURDIN MARIE, ROME
Retraite de carême à Ariccia , 2018 capture @ Vatican Media
Sans Marie, l’Église risque de « se déshumaniser », explique le p. José Tolentino de Mendonça.
Les béatitudes et le style de vie des croyants et de l’Église c’était le thème de la méditation par laquelle le prédicateur de la retraite de carême du pape François a conclu, ce vendredi matin, 23 février 2018, la retraite de carême du pape et de la Curie romaine, à la Maison du Divin Maître à Ariccia, à 25 km au sud-est de Rome.
La béatitude de Marie
Cette 10e méditation suit le fil conducteur du Discours sur la montagne, et de l’enseignement des béatitudes, « visage » et « vie » même de Jésus auquel le prédicateur invite ses retraitants à se « conformer ». Il a évoqué la « béatitude de la soif » et la « béatitude de Marie », selon la synthèse publiée en italien par Vatican Media.
En effet, le p. José Tolentino voit l’Eglise en « style marial »: Marie « hospitalière », à l’écoute et « ouverte à la vie » ; Marie « honnête » à l’égard de Dieu ; Marie « au service » d’un projet « plus grand ». Sans Marie, conclut-il, l’Église risque de « se déshumaniser », de devenir « fonctionnaliste », « une usine fébrile incapable de se poser ».
C’est encore à l’Église que le p. José Tolentino s’adresse dans la dernière partie de sa méditation consacrée à la « béatitude » de Marie, maîtresse et modèle de l’Église en chemin. Il est important de ne pas la regarder la de façon « abstraite », mais au contraire « réelle et concrète ».
Son dialogue avec Dieu, au moment de l’Annonciation est « franc »: il ne laisse pas apparaître « d’émotions », de « surprises », ni de « doutes », jusqu’à la « confiance inconditionnelle » et à son « oui »: Dieu ne sauve pas « malgré nous, mais avec tout ce que nous sommes » et cela fait « affronter la vie avec une confiance renouvelée ».
Un auto-portrait de Jésus
Les béatitudes, dans l’Évangile de Matthieu, « sont plus qu’une loi », explique le prédicateur : elles représentent en soi une « configuration de la vie », un « véritable appel existentiel », elles dessinent « l’art d’être ici et maintenant », mais indiquent aussi l’ « horizon de plénitude eschatologique ».
Surtout, explique-t-il encore, les béatitudes sont aussi l’ « autoportrait de Jésus le plus exact et le plus fascinant », la « clé « de sa vie, « pauvre en esprit, doux et miséricordieux, assoiffé et homme de paix, affamé de justice et avec la capacité d’accueillir tous les hommes ».
« Les béatitudes sont son autoportrait, l’image de lui-même qu’il nous révèle sans cesse et qu’il imprime dans nos cœurs. Mais elles sont aussi son portrait qui doit nous servir de modèle dans le processus de transformation de notre propre visage, dans lequel approfondir l’ « image et la ressemblance » spirituelle qui lie chaque jour notre destin à celui de Jésus ».
La béatitude de la soif
Et celui qui est son « portrait » et sa « mémoire », remarque le père José Tolentino, le voit aussi « tel qu’il est ».
La « soif de Dieu » – thème de la retraite – c’est de faire que « la vie de ses créatures soit une vie de béatitude ». Comment ?, interroge le p. Tolentino, par l’oeuvre de la rédemption, signe d’un « amour » et d’une « confiance » qui se révèlent «inconditionnels».
C’est cela la « méthode » du Christ, explique-t-il, c’est cela la « béatitude qui nous sauve »: c’est cet « étonnement d’amour qui nous fait repartir », cette « soif » qui réussit à arracher à l’ « exil ».
« C’est pourquoi, continue le prédicateur du pape, un christianisme de survie ne nous suffit pas, ni un catholicisme de manutention. Un véritable croyant, une communauté croyante, ne peuvent vivre uniquement de manutention : il lui faut une âme jeune et amoureuse, qui se nourrisse de la joie de la recherche et de la découverte, risque l’hospitalité de la Parole de Dieu dans la vie concrète, parte à la rencontre de ses frères dans le présent et dans l’avenir, vive dans le dialogue confiant et caché de la prière ».
Il est urgent, diagnostique le prédicateur, de « redécouvrir la béatitude de la soif » : le pire pour un croyant, c’est d’ « être rassasié de Dieu ». Heureux en revanche ceux qui « ont faim et soif de Dieu » : l’expérience de la foi, en effet, insiste-t-il, « ne sert pas à résoudre la soif », mais à « dilater notre désir de Dieu, à intensifier notre recherche. Peut-être avons-nous besoin de nous réconcilier plusieurs fois avec notre soif en nous redisant : “Ma soif est ma béatitude” ».
Avec une traduction d’Hélène Ginabat
21.02.18

Retraite de carême : quand nous renonçons à la soif, nous commençons à mourir
Quatrième méditation de don Josè Tolentino de Mendonça
20 FÉVRIER 2018ANNE KURIAN ROME
Retraite de carême à Ariccia © Vatican Media
« Quand nous renonçons à la soif, nous commençons à mourir », a affirmé don Josè Tolentino de Mendonça ce matin, 20 février 2018, devant le pape François et la Curie romaine réunis à Ariccia pour leur retraite de carême. Le prédicateur portugais a médité sur l’acédie, la perte du goût de vivre.
Dans cette quatrième méditation rapportée par Vatican News, il a souligné que le « démon de l’acédie », de la paresse, était une insatisfaction profonde qui conduisait à la « psychologie de la tombe ».
« Quand nous renonçons à la soif, nous commençons à mourir, a-t-il mis en garde. Quand nous renonçons au désir de trouver du goût dans les rencontres, dans les conversations, dans les échanges, dans la sortie de nous-mêmes, dans les projets, dans les travaux, dans la prière… Cela diminue notre curiosité pour l’autre, notre ouverture à l’inédit, et tout nous semble comme un déjà vu réchauffé que nous ressentons comme un poids inutile, incongru et absurde, qui nous écrase. »
Aujourd’hui, a noté don Josè Tolentino de Mendonça, « on médicalise l’acédie en l’abordant comme une pathologie qui doit être traitée du point de vue psychiatrique ». Mais même dans un cadre clinique, « il est évident que l’acédie ou les états dépressifs » ne peuvent se soigner seulement avec des « médicaments », car « le soin doit impliquer la personne entière ».
Pour le poète portugais, « il existe beaucoup de souffrances cachées dont nous devons découvrir l’origine qui s’enracine dans le mystère de la solitude humaine ».
La tristesse liée à l’acédie est celle du jeune homme riche, qui obéissait à tous les commandements mais préféra ses biens à la suite du Christ : « Il n’est pas rare que notre tristesse provienne de cette incapacité. »
Don Josè Tolentino de Mendonça a conclu par l’invitation de l’Apocalypse, “viens” : « Dans cette parole, il y a la trace de tout ce dont nous avons besoin, la raison de notre cri, la raison de notre espérance et, si souvent, la raison de notre désespoir, de notre échec, et la nécessité de dépasser tout cela en Dieu… ‘Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et opprimés, et je vous donnerai le repos’. »
Retraite de carême : retrouver la soif, le désir
Troisième méditation de don Josè Tolentino de Mendonça
20 FÉVRIER 2018 ANNE KURIAN ROME
Retraite de carême à Ariccia © Vatican Media
Retrouver la soif, le désir, redécouvrir « la richesse de notre monde émotionnel », tel est le cœur de la troisième prédication de don Josè Tolentino de Mendonça, devant le pape François et la curie romaine, à Ariccia, dans l’après-midi du 19 février 2018.
Dans sa méditation de carême sur le thème « J’ai réalisé que j’étais assoiffé », rapportée par Vatican News, le prédicateur portugais a souligné qu’ « entrer en contact avec sa soif n’est pas une opération facile, mais si nous ne le faisons pas, la vie spirituelle perd son adhérence à notre réalité ».
En effet, a-t-il constaté, depuis les Lumières, « nous nous sommes construit un château abstrait phénoménal… Nous sommes plus préoccupés par la crédibilité rationnelle de l’existence de foi que par sa crédibilité existentielle, anthropologique et affective. Nous nous occupons davantage de la raison que du sentiment. Nous tournons le dos à la richesse de notre monde émotionnel ». Or, l’homme est « un mélange de nombreuses composantes émotionnelles, psychologiques et spirituelles, et nous devons tous en avoir conscience ».
Mais pour découvrir sa soif intérieure, a poursuivi don Josè Tolentino de Mendonça, il ne faut pas confondre « le désir avec les besoins » : « Le désir est un manque qui n’est jamais complètement satisfait, c’est une tension, une blessure toujours ouverte, une interminable exposition à l’altérité. Le désir est une aspiration qui nous transcende et qui ne nous détermine pas, comme la nécessité. »
Pour le poète portugais, le discours capitaliste promet de libérer le désir de l’inhibition de la loi et de la morale au nom d’une satisfaction illimitée : « Le plaisir, la passion, la joie s’épuisent dans un consumérisme effréné d’objets comme de personnes », et l’on parvient à l’extinction de la soif, à l’agonie du désir.
« Nous avons peut-être besoin de retrouver le désir, son itinérance et son ouverture, plus que les codifications où tout est déjà prévu, établi, garanti, a estimé don Josè Tolentino de Mendonça. L’expérience du désir n’est pas un titre de propriété ou une forme de possession : c’est plutôt une condition de mendicité. Le croyant est un mendiant de miséricorde. »
En conclusion, le prédicateur a encouragé chacun à accepter sa vulnérabilité et à retrouver le désir d’être reconnu et touché, comme le lépreux qui s’approche de Jésus (Mt 8,3), comme la belle-mère de Pierre (Mt 8,15), comme la femme qui souffrait d’hémorragie (Mt 9,20), comme l’aveugle (Mt 8,27).
19.02.18
Retraite de carême : « remettons notre soif en Dieu »
Deuxième méditation de don Josè Tolentino de Mendonça
19 FÉVRIER 2018 PAPE FRANÇOIS, ROME
Retraite de carême à Ariccia © L'Osservatore Romano
« Remettons notre soif en Dieu » : c’est l’invitation de don Josè Tolentino de Mendonça, au début de la retraite de carême du pape François et de la curie romaine, au matin du 19 février 2018, à Ariccia. Il a mis en garde contre la tentation de « l’évasion spirituelle ».
Dans cette deuxième méditation sur le thème « La science de la soif », rapportée par Vatican News, le prédicateur a médité sur l’une des dernières phrases de l’Apocalypse : « L’Esprit et l’Épouse disent : ‘Viens !’ Celui qui entend, qu’il dise : ‘Viens !’ Celui qui a soif, qu’il vienne. Celui qui le désire, qu’il reçoive l’eau de la vie, gratuitement. »
Soulignant l’« abondance » de la « gratuité » de Dieu, il a encouragé les retraitants à reconnaître qu’ils sont « incomplets et en construction » : Dieu sait « quand les obstacles nous arrêtent » et combien « les dérives nous retardent ».
« La soif nous coupe la respiration, nous épuise, nous finit, a poursuivi don Josè Tolentino de Mendonça. Elle nous laisse assiégés et sans force pour réagir », elle « nous conduit à l’extrême limite ».
Pour le poète portugais, la soif de l’homme d’aujourd’hui se décrit ainsi : « un homme sans racines, ni maison, incapable de liens, perdu dans le vide du labyrinthe où il écoute le bruit solitaire de ses propres pas ».
Mais les sociétés, a-t-il constaté, « imposent la consommation comme critère de bonheur, transformant le désir en piège », et la soif se décline « dans la désaffection vis-à-vis de ce qui est essentiel, dans une incapacité de discernement ».
Or cette soif ne s’étanche pas avec une « vitrine », dans un « achat », dans un « objet » car l’objet profond du désir est « un être absent », un « objet toujours manquant ». Il n’existe pas de « pilules en mesure de résoudre mécaniquement nos problèmes ».
Mettant en garde contre une « attitude d’évasion spirituelle sans jamais prendre conscience que nous sommes en fuite », il a appelé à discerner sa soif, en ralentissant le rythme, en « prenant conscience de nos besoins… remettons notre soif en Dieu ».
Retraite de carême : Dieu est mendiant de l’homme
Première méditation de don Josè Tolentino de Mendonça
19 FÉVRIER 2018 ANNE KURIAN PAPE FRANÇOIS
Arrivée du pape François à Ariccia 18/02/2018 © Vatican Media
Dieu est mendiant de l’homme. C’est le cœur de la première prédication de don Josè Tolentino de Mendonça, devant le pape François et les membres de la curie romaine qui sont rentrés en retraite de carême dans la soirée du 18 février 2018, à Ariccia.
Au fil de sa méditation rapportée par Vatican News en italien, le prêtre portugais a commenté la rencontre entre Jésus et la Samaritaine, dans l’Evangile de saint Jean (Jn 4.5-24). Il a souligné que le « Donne-moi à boire » de Jésus signifiait : « Donne-moi ce que tu as. Ouvre ton cœur, donne-moi ce que tu es ».
Dans son introduction à la retraite de la curie, don Josè Tolentino de Mendonça a souligné l’étonnement qui naît de la demande de Jésus car « c’est nous qui sommes venus boire » et c’est Jésus qui mendie : « Dieu aussi est mendiant de l’homme… aussi grand que soit notre désir, le désir de Dieu est encore plus grand ».
« Dans notre fragilité la plus abyssale et nocturne, nous nous sentons compris et cherchés par la soif de Jésus » qui est « une soif de rejoindre nos soifs, d’entrer en contact avec nos blessures ». Il demande : « Donne-moi à boire ».
Le prédicateur a fait observer que lorsque Jésus dit à la Samaritaine la vérité sur sa vie, « cela ne l’humilie pas ni ne la paralyse. Au contraire, elle se sent rencontrée, visitée par la grâce, libérée par la vérité du Seigneur ».
Don Josè Tolentino de Mendonça a encouragé à « désapprendre », pour apprendre à recevoir ce que Dieu donne. Il a conclu en proposant d’adopter cette attitude : « Seigneur, je suis ici en attente de rien », c’est-à-dire « j’attends ce que tu me donneras ».
14.02.18
Carême : « Arrête-toi, regarde et reviens ! »
Messe du Mercredi des Cendres avec le pape (Homélie intégrale)
14 FÉVRIER 2018 RÉDACTION PAPE FRANÇOIS
Messe des Cendres à Sainte-Sabine © Vatican Media
« Arrête-toi, regarde et reviens ! » C’est l’appel pressant du pape François pour l’entrée en carême. En célébrant la messe pour le Mercredi des Cendres, ce 14 février 2018, dans l’église Sainte-Sabine de Rome, le pape a offert une méditation sur ces attitudes, trois antidotes contre les « démons » de la méfiance, de l’apathie et de la résignation.
Le Carême est un temps précieux pour « laisser notre cœur recommencer à battre au rythme du cœur de Jésus », a souligné le pape qui a invité : « Arrête-toi un peu, laisse cette agitation et cette course insensée qui remplit le cœur de l’amertume… Regarde les signes qui empêchent d’éteindre la charité… Reviens, sans peur, vers les bras ouverts et impatients de ton Père. »
Déclinant ces appels à la deuxième personne, dans un style direct, il a aussi encouragé à « la vraie vie » qui est « quelque chose de bien différent et notre cœur le sait bien ».
Le mercredi des Cendres est traditionnellement aussi la première « station » de carême à Rome : une antique tradition propose un pèlerinage quotidien en différentes églises de Rome, pour le carême, la Semaine sainte, et la première semaine de Pâques. Le pape a présidé cette première station en l’église bénédictine Saint-Anselme, sur la colline de l’Aventin, avant la traditionnelle procession pénitentielle jusqu’à Sainte-Sabine.
AK
Homélie du pape François
Le temps du Carême est un temps favorable pour corriger les accords dissonants de notre vie chrétienne et accueillir l’annonce de la Pâque du Seigneur toujours nouvelle, joyeuse et pleine d’espérance. L’Église dans sa sagesse maternelle nous propose de prêter une attention particulière à tout ce qui peut refroidir et rouiller notre cœur de croyant.
Les tentations auxquelles nous sommes exposés sont nombreuses. Chacun d’entre nous connaît les difficultés qu’il doit affronter. Et il est triste de constater comment, face aux vicissitudes quotidiennes, profitant de la souffrance et de l’insécurité, se lèvent des voix qui ne savent que semer la méfiance. Et si le fruit de la foi est la charité – comme aimait le répéter Mère Térésa de Calcutta -, le fruit de la méfiance est l’apathie et la résignation. Méfiance, apathie et résignation : ces démons qui cautérisent et paralysent l’âme du peuple croyant.
Le Carême est un temps précieux pour débusquer ces dernières, ainsi que d’autres tentations et laisser notre cœur recommencer à battre au rythme du cœur de Jésus. Toute cette liturgie est imprégnée par ces sentiments et nous pourrions dire que cela fait écho à trois expressions qui nous sont offertes pour «réchauffer le cœur du croyant»: arrête-toi, regarde et reviens.
Arrête-toi un peu, laisse cette agitation et cette course insensée qui remplit le cœur de l’amertume de sentir que l’on n’arrive jamais à rien. Arrête-toi, laisse cette injonction à vivre en accéléré qui disperse, divise et finit par détruire le temps de la famille, le temps de l’amitié, le temps des enfants, le temps des grands-parents, le temps de la gratuité… le temps de Dieu.
Arrête-toi un peu devant la nécessité d’apparaître et d’être vu par tous, d’être continuellement à “l’affiche ”, ce qui fait oublier la valeur de l’intimité et du recueillement.
Arrête-toi un peu devant le regard hautain, le commentaire fugace et méprisant qui naît de l’oubli de la tendresse, de la compassion et du respect dans la rencontre des autres, en particulier de ceux qui sont vulnérables, blessés et même de ceux qui sont empêtrés dans le péché et l’erreur.
Arrête-toi un peu devant l’obsession de vouloir tout contrôler, tout savoir, tout dévaster, qui naît de l’oubli de la gratitude face au don de la vie et à tant de bien reçu.
Arrête-toi un peu devant le bruit assourdissant qui atrophie et étourdit nos oreilles et qui nous fait oublier le pouvoir fécond et créateur du silence.
Arrête-toi un peu devant l’attitude favorisant des sentiments stériles, inféconds qui surgissent de l’enfermement et de l’apitoiement sur soi-même et qui conduisent à oublier d’aller à rencontre des autres pour partager les fardeaux et les souffrances.
Arrête-toi devant la vacuité de ce qui est immédiat, momentané et éphémère, qui nous prive de nos racines, de nos liens, de la valeur des parcours et du fait de nous savoir toujours en chemin.
Arrête-toi pour regarder et contempler!
Regarde les signes qui empêchent d’éteindre la charité, qui maintiennent vive la flamme de la foi et de l’espérance. Visages vivants de la tendresse et de la bonté de Dieu qui agit au milieu de nous.
Regarde le visage de nos familles qui continuent à miser jour après jour, avec beaucoup d’effort, pour aller de l’avant dans la vie et qui, entre les contraintes et les difficultés, ne cessent pas de tout tenter pour faire de leur maison une école de l’amour.
Regarde les visages interpellant de nos enfants et des jeunes porteurs d’avenir et d’espérance, porteurs d’un lendemain et d’un potentiel qui exigent dévouement et protection. Germes vivants de l’amour et de la vie qui se fraient toujours un passage au milieu de nos calculs mesquins et égoïstes.
Regarde les visages de nos anciens, marqués par le passage du temps ; visages porteurs de la mémoire vivante de nos peuples. Visages de la sagesse agissante de Dieu.
Regarde les visages de nos malades et de tous ceux qui s’en occupent ; visages qui, dans leur vulnérabilité et dans leur service, nous rappellent que la valeur de chaque personne ne peut jamais être réduite à une question de calcul ou d’utilité.
Regarde les visages contrits de tous ceux qui cherchent à corriger leurs erreurs et leurs fautes et qui, dans leurs misères et leurs maux, luttent pour transformer les situations et aller de l’avant.
Regarde et contemple le visage de l’Amour Crucifié qui, aujourd’hui, sur la croix, continue d’être porteur d’espérance; main tendue à ceux qui se sentent crucifiés, qui font l’expérience dans leur vie du poids leurs échecs, de leurs désenchantements et de leurs déceptions.
Regarde et contemple le visage concret du Christ crucifié par amour de tous sans exclusion. De tous ? Oui, de tous. Regarder son visage est l’invitation pleine d’espérance de ce temps de Carême pour vaincre les démons de la méfiance, de l’apathie et de la résignation. Visage qui nous incite à nous écrier: le Royaume de Dieu est possible!
Arrête-toi, regarde et reviens. Reviens à la Maison de ton Père. Reviens, sans peur, vers les bras ouverts et impatients de ton Père riche en miséricorde qui t’attend (cf. Ep. 2,4).
Reviens ! Sans peur, c’est le temps favorable pour revenir à la maison, à la maison «de mon Père et de votre Père» (cf. Jn. 20,17). C’est le temps pour se laisser toucher le cœur… Rester sur le chemin du mal n’est que source d’illusion et de tristesse. La vraie vie est quelque chose de bien différent et notre cœur le sait bien. Dieu ne se lasse pas et ne se lassera pas de tendre la main (Cf. Bulle Misericordiae Vultus, n.19).
Reviens, sans peur, pour faire l’expérience de la tendresse de Dieu qui guérit et réconcilie.
Laisse le Seigneur guérir les blessures du péché et accomplir la prophétie faite à nos pères: «Je vous donnerai un cœur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’ôterai de votre chair le cœur de pierre, je vous donnerai un cœur de chair» (Ez. 36,26).
Arrête-toi, regarde et reviens !
© Librairie éditrice du Vatican
12.02.18
MESSAGE DU PAPE
FRANÇOIS
POUR LE CARÊME 2018
« À cause de l’ampleur du mal, la charité de la plupart des hommes se refroidira » (Mt 24, 12)
Chers Frères et Sœurs,
La Pâque du Seigneur vient une fois encore jusqu’à nous ! Chaque année, pour nous y préparer, la Providence de Dieu nous offre le temps du Carême. Il est le « signe sacramentel de notre conversion »[1], qui annonce et nous offre la possibilité de revenir au Seigneur de tout notre cœur et par toute notre vie.
Cette année encore, à travers ce message, je souhaite inviter l’Eglise entière à vivre ce temps de grâce dans la joie et en vérité ; et je le fais en me laissant inspirer par une expression de Jésus dans l’Évangile de Matthieu : « À cause de l’ampleur du mal, la charité de la plupart des hommes se refroidira » (24, 12). Cette phrase fait partie du discours sur la fin des temps prononcé à Jérusalem, au Mont des Oliviers, précisément là où commencera la Passion du Seigneur. Jésus, dans sa réponse à l’un de ses disciples, annonce une grande tribulation et il décrit la situation dans laquelle la communauté des croyants pourrait se retrouver : face à des évènements douloureux, certains faux prophètes tromperont beaucoup de personnes, presqu’au point d’éteindre dans les cœurs la charité qui est le centre de tout l’Évangile.
Les faux prophètes
Mettons-nous à l’écoute de ce passage et demandons-nous : sous quels traits ces faux prophètes se présentent-ils ?
Ils sont comme des « charmeurs de serpents », c’est-à-dire qu’ils utilisent les émotions humaines pour réduire les personnes en esclavage et les mener à leur gré. Que d’enfants de Dieu se laissent séduire par l’attraction des plaisirs fugaces confondus avec le bonheur ! Combien d’hommes et de femmes vivent comme charmés par l’illusion de l’argent, qui en réalité les rend esclaves du profit ou d’intérêts mesquins ! Que de personnes vivent en pensant se suffire à elles-mêmes et tombent en proie à la solitude !
D’autres faux prophètes sont ces « charlatans » qui offrent des solutions simples et immédiates aux souffrances, des remèdes qui se révèlent cependant totalement inefficaces : à combien de jeunes a-t-on proposé le faux remède de la drogue, des relations « use et jette », des gains faciles mais malhonnêtes ! Combien d’autres encore se sont immergés dans une vie complètement virtuelle où les relations semblent plus faciles et plus rapides pour se révéler ensuite tragiquement privées de sens ! Ces escrocs, qui offrent des choses sans valeur, privent par contre de ce qui est le plus précieux : la dignité, la liberté et la capacité d’aimer. C’est la duperie de la vanité, qui nous conduit à faire le paon…. pour finir dans le ridicule ; et du ridicule, on ne se relève pas. Ce n’est pas étonnant : depuis toujours le démon, qui est « menteur et père du mensonge » (Jn 8, 44), présente le mal comme bien, et le faux comme vrai, afin de troubler le cœur de l’homme. C’est pourquoi chacun de nous est appelé à discerner en son cœur et à examiner s’il est menacé par les mensonges de ces faux prophètes. Il faut apprendre à ne pas en rester à l’immédiat, à la superficialité, mais à reconnaître ce qui laisse en nous une trace bonne et plus durable, parce que venant de Dieu et servant vraiment à notre bien.
Un cœur froid
Dans sa description de l’enfer, Dante Alighieri imagine le diable assis sur un trône de glace[2] ; il habite dans la froidure de l’amour étouffé. Demandons-nous donc : comment la charité se refroidit-elle en nous ? Quels sont les signes qui nous avertissent que l’amour risque de s’éteindre en nous ?
Ce qui éteint la charité, c’est avant tout l’avidité de l’argent, « la racine de tous les maux » (1Tm 6, 10) ; elle est suivie du refus de Dieu, et donc du refus de trouver en lui notre consolation, préférant notre désolation au réconfort de sa Parole et de ses Sacrements.[3] Tout cela se transforme en violence à l’encontre de ceux qui sont considérés comme une menace à nos propres « certitudes » : l’enfant à naître, la personne âgée malade, l’hôte de passage, l’étranger, mais aussi le prochain qui ne correspond pas à nos attentes.
La création, elle aussi, devient un témoin silencieux de ce refroidissement de la charité : la terre est empoisonnée par les déchets jetés par négligence et par intérêt ; les mers, elles aussi polluées, doivent malheureusement engloutir les restes de nombreux naufragés des migrations forcées ; les cieux – qui dans le dessein de Dieu chantent sa gloire – sont sillonnés par des machines qui font pleuvoir des instruments de mort.
L’amour se refroidit également dans nos communautés. Dans l’Exhortation Apostolique Evangelii Gaudium, j’ai tenté de donner une description des signes les plus évidents de ce manque d’amour. Les voici : l’acédie égoïste, le pessimisme stérile, la tentation de l’isolement et de l’engagement dans des guerres fratricides sans fin, la mentalité mondaine qui conduit à ne rechercher que les apparences, réduisant ainsi l’ardeur missionnaire.[4]
Que faire ?
Si nous constatons en nous-mêmes ou autour de nous les signes que nous venons de décrire, c’est que l’Eglise, notre mère et notre éducatrice, nous offre pendant ce temps du Carême, avec le remède parfois amer de la vérité, le doux remède de la prière, de l’aumône et du jeûne.
En consacrant plus de temps à la prière, nous permettons à notre cœur de découvrir les mensonges secrets par lesquels nous nous trompons nous-mêmes[5], afin de rechercher enfin la consolation en Dieu. Il est notre Père et il veut nous donner la vie.
La pratique de l’aumône libère de l’avidité et aide à découvrir que l’autre est mon frère : ce que je possède n’est jamais seulement mien. Comme je voudrais que l’aumône puisse devenir pour tous un style de vie authentique ! Comme je voudrais que nous suivions comme chrétiens l’exemple des Apôtres, et reconnaissions dans la possibilité du partage de nos biens avec les autres un témoignage concret de la communion que nous vivons dans l’Eglise. A cet égard, je fais mienne l’exhortation de Saint Paul quand il s’adressait aux Corinthiens pour la collecte en faveur de la communauté de Jérusalem : « C’est ce qui vous est utile, à vous » (2 Co 8, 10). Ceci vaut spécialement pour le temps de carême, au cours duquel de nombreux organismes font des collectes en faveur des Eglises et des populations en difficulté. Mais comme j’aimerais que dans nos relations quotidiennes aussi, devant tout frère qui nous demande une aide, nous découvrions qu’il y a là un appel de la Providence divine: chaque aumône est une occasion pour collaborer avec la Providence de Dieu envers ses enfants ; s’il se sert de moi aujourd’hui pour venir en aide à un frère, comment demain ne pourvoirait-il pas également à mes nécessités, lui qui ne se laisse pas vaincre en générosité ? [6]
Le jeûne enfin réduit la force de notre violence, il nous désarme et devient une grande occasion de croissance. D’une part, il nous permet d’expérimenter ce qu’éprouvent tous ceux qui manquent même du strict nécessaire et connaissent les affres quotidiennes de la faim ; d’autre part, il représente la condition de notre âme, affamée de bonté et assoiffée de la vie de Dieu. Le jeûne nous réveille, nous rend plus attentifs à Dieu et au prochain, il réveille la volonté d’obéir à Dieu, qui seul rassasie notre faim.
Je voudrais que ma voix parvienne au-delà des confins de l’Eglise catholique, et vous rejoigne tous, hommes et femmes de bonne volonté, ouverts à l’écoute de Dieu. Si vous êtes, comme nous, affligés par la propagation de l’iniquité dans le monde, si vous êtes préoccupés par le froid qui paralyse les cœurs et les actions, si vous constatez la diminution du sens d’humanité commune, unissez-vous à nous pour qu’ensemble nous invoquions Dieu, pour qu’ensemble nous jeûnions et qu’avec nous vous donniez ce que vous pouvez pour aider nos frères !
Le feu de Pâques
J’invite tout particulièrement les membres de l’Eglise à entreprendre avec zèle ce chemin du carême, soutenus par l’aumône, le jeûne et la prière. S’il nous semble parfois que la charité s’éteint dans de nombreux cœurs, cela ne peut arriver dans le cœur de Dieu ! Il nous offre toujours de nouvelles occasions pour que nous puissions recommencer à aimer.
L’initiative des « 24 heures pour le Seigneur », qui nous invite à célébrer le sacrement de Réconciliation pendant l’adoration eucharistique, sera également cette année encore une occasion propice. En 2018, elle se déroulera les vendredi 9 et samedi 10 mars, s’inspirant des paroles du Psaume 130 : « Près de toi se trouve le pardon » (Ps 130, 4). Dans tous les diocèses, il y aura au moins une église ouverte pendant 24 heures qui offrira la possibilité de l’adoration eucharistique et de la confession sacramentelle.
Au cours de la nuit de Pâques, nous vivrons à nouveau le rite suggestif du cierge pascal : irradiant du « feu nouveau », la lumière chassera peu à peu les ténèbres et illuminera l’assemblée liturgique. « Que la lumière du Christ, ressuscitant dans la gloire, dissipe les ténèbres de notre cœur et de notre esprit »[7] afin que tous nous puissions revivre l’expérience des disciples d’Emmaüs : écouter la parole du Seigneur et nous nourrir du Pain eucharistique permettra à notre cœur de redevenir brûlant de foi, d’espérance et de charité.
Je vous bénis de tout cœur et je prie pour vous. N’oubliez pas de prier pour moi.
Du Vatican, le 1er novembre 2017
Solennité de la Toussaint
François
09.02.18
Homélie de la messe matinale du pape François
à Sainte Marthe
Le pape François invite chacun à « veiller » « tous les jours » « sur son cœur » pour ne pas lui permettre de s’affaiblir : « Il faut mieux la clarté d’un péché que l’affaiblissement du cœur. » Car « un pécheur peut devenir un saint ».
Tel est le message central de son homélie prononcée à la messe en la chapelle de la Maison Sainte-Marthe au Vatican ce jeudi matin 8 février 2018, indique Vatican News en italien.
Pour garder son cœur fidèle à Dieu, il faut de la « vigilance » : « Tous les jours, veiller sur son cœur. Comment va mon cœur, sa relation avec le Seigneur? Et goûter la beauté et la joie de la fidélité. »
« Un homme et une femme au cœur faible, ou affaibli, est une femme, un homme vaincu, déclare le pape. C’est le processus de nombreux chrétiens, de beaucoup d’entre nous. »
Méditant sur le passage du Livre des Rois, qui évoque Salomon et de sa désobéissance, le pape explique que « le cœur de Salomon ne reste pas intègre avec le Seigneur son Dieu, comme le cœur de David son père. »
« Le grand roi Salomon, poursuit-il, finit corrompu : tranquillement corrompu, parce que son cœur avait faibli. »
« David est saint », rappelle le pape, même si « c’était un pécheur » : « Un pécheur peut devenir saint, affirme le pape. Salomon a été rejeté parce qu’il était corrompu. Un corrompu ne peut pas devenir saint. Et l’on y arrive à la corruption par ce chemin de l’affaiblissement du cœur. »
« David, qui sait qu’il a péché, poursuit le pape, demande pardon à chaque fois, tandis que Salomon, dont tout le monde disait du bien, s’est éloigné de Dieu et il ne s’en est pas aperçu. »
« Et c’est là qu’est le problème de l’affaiblissement du cœur, dit le pape. Quand le cœur commence à faiblir, ce n’est pas comme une situation de péché. Tu fais un péché, tu t’en aperçois aussitôt : « J’ai fait ce péché », c’est clair. L’affaiblissement du cœur est un chemin lent, qui glisse petit à petit, petit à petit, petit à petit. Et Salomon, endormi dans sa gloire, dans sa réputation, a commencé à emprunter ce chemin. »
Trop souvent, estime le pape, les chrétiens disent : « Non, je ne fais pas de gros péchés » : « Mais comment va ton cœur ? Est-il fort ? Reste-t-il fidèle au Seigneur, ou bien glisses-tu lentement ? »
Avec une traduction d’Hélène Ginabat